Livre
Photo de Le Club des policiers yiddish

Le Club des policiers yiddish

Aux éditions : 
Date de parution : 08/01/09  -  Livre
ISBN : 9782221108796
Commenter
ketty   - le 31/10/2017

Le Club des policiers yiddish

Michael Chabon, écrivain, essayiste et scénariste américain est né en 1963. Sa carrière débute en 1987, avec la publication des Mystères de Pittsburgh. Il publie par la suite Des garçons Épatants, La Solution finale, Les Extraordinaires Aventures de Kavaliers et Clay (prix Pulitzer 2001).
Ses textes portent souvent la marque de son histoire personnelle. Le Club des policiers yiddish qui puise largement dans son identité juive ne déroge pas à cette règle. Ce roman, publié en France par Robert Laffont, a obtenu, en version originale, le prix Hugo 2008.

La dernière enquête de Meyer Landsman

Fatigué, usé par la vie, l’alcool dont il est imbibé dès le matin et les infâmes papiros qu’il fume en permanence, l’inspecteur Meyer Landsman loge au Zamenhof, un hôtel sordide de Sitka, où il loue une chambre au mois. Occupé à cuver sa vodka et l’échec de son couple, il est tiré du lit par le veilleur de nuit : un client a été retrouvé mort dans la chambre 208. L’homme, jeune, roux, drogué et probablement juif comme la plupart des habitants de la colonie, a été tué d’une balle dans la nuque, laissant en cours une partie d’échecs.
L’instinct du flic, toujours en lui, le pousse à mener l’enquête, découvrant couche par couche, des enjeux d’une importance capitale, susceptibles d’influer sur l’avenir de Sitka et peut-être même, du monde dans son ensemble. Plaque et armes retirées à cause de sa curiosité, Landsman va poursuivre ses recherches, n’ayant plus en poche que sa carte de l’improbable Club des Policiers Yiddish.

Drôle de temps pour être juif


En suivant la trace des assassins de l’homme du Zamenhof, Landsman lève donc le voile sur les activités des factions les plus secrètes de son peuple et se trouve face à une prophétie, assez puissante pour bouleverser son monde.
Landsman est juif, à sa façon. Bien qu’il ne soit pas pratiquant, il connaît les traditions et en a gardé, de par son éducation, un certain nombre de superstitions.  Tout au long du récit, il croise toutes sortes de juifs. Des mystiques comme cet Eli, vêtu de blanc et parlant sans arrêt du Messie et de la Terre Promise, des fanatiques comme les verbovers, chapeaux noirs et rites millénaires, des artistes et des m’as-tu-vu vêtus de riches étoffes,  et ceux, plus nombreux qui s’arrangent de leur héritage et se construisent une identité capable de s’adapter à toutes les cultures, quelles qu’elles soient. Tous se disent juifs d’Alaska. Ils se délectent des mêmes  spécialités culinaires, emploient un vocabulaire émaillé de mots yiddish déroutants pour le lecteur et s’accordent à penser que le temps est au désespoir. « Drôle de temps pour être juif ! », phrase rituelle de salutation, trouve dans ce roman cent illustrations. Cent manières de se réclamer d’un peuple à la fois élu et maudit et pour qui l’espoir et le désespoir ne font qu’un, au bout du compte.

Uchronie policière

Un cadavre mystérieux, un enquêteur désabusé, des indics, une faune de délinquants plus ou moins dangereux, et une énigme à résoudre… voici réunis tous les ingrédients d’un roman policier classique.
Mais si ce roman, paru en 2008 aux USA, a décroché le prix Hugo, c’est à cause de sa dimension uchronique. En effet, le monde de Landsman, n’est pas tout à fait celui que nous connaissons. Son histoire diverge de la nôtre quand, en 1940, une partie de l’Alaska est réservée au peuple juif. Venus de toute l’Europe, ils se sont installés dans cette région inhospitalière où, comme partout, ils ont prospéré, vécu, fait des enfants. Mais la colonie est provisoire. Cinquante ans après, Sitka doit être rétrocédée aux États-Unis. Que vont devenir ses habitants ? Le récit de l’enquête de Landsman se situe quelques mois avant la rétrocession et permet, à côté de l’enquête et sous les dehors légers d’un simple policier,  une réflexion originale sur le destin du peuple juif.
Les personnages caricaturaux, les situations cocasses liées aux données de l’uchronie de Chabon ne se livrent qu’avec un fond de tristesse, un humour aigre et piquant, comme les pickles et les sauces au yaourt. Un humour juif ?
Le style est vivant, le récit touchant et le monde imaginé tout à fait crédible.
Le Club des policiers yiddish est un ouvrage surprenant, étrange, à découvrir.
Partager cet article

Qu'en pensez-vous ?