stephaneg
- le 20/09/2018
Le Chant d'Ekhirit
Le Chant d'Ekhirit est le quatrième roman d'Olivier May, auteur suisse né en 1957. Ce dernier, anthropologue, est doyen dans un collège genevois et participe à des programmes archéologiques dans les Alpes. Il aborde dans son dernier roman, publié chez Griffe d'Encre, un sujet des plus sensibles.
La vengeance d'un frère
En 2017, la petite Maya disparaît pendant les vacances de sa famille.
Sept ans plus tard, ses parents recommencent tout doucement à vivre. Seul son frère, Jon, reste persuadé qu'elle est toujours en vie. Il va tout faire, absolument tout, pour la délivrer des mains des monstres qui la lui ont arrachée.
Un sujet qui aurait mérité plus qu'une novella
Olivier May a décidé, dans Le Chant d'Ekhirit, d'aborder le thème de la pédophilie du point de vue des proches d'une victime. Dans la novella qui paraît chez Griffe d'Encre, ces derniers sont la famille Zorn, dont la fille de sept ans, Maya, a été enlevée au cours de vacances dans l'île de Rhodes. Alors que les parents ont commencé à baisser les bras suite à l'absence de pistes pour retrouver leur fille qui est peut être morte, le fils de vingt ans, lui, rongé par la culpabilité, a continué les recherches sur le Net. Et il a trouvé la preuve que Maya est vivante. Il a décidé de faire justice lui-même, d'éliminer les bourreaux de sa sœur et de la libérer de son joug.
Jon Zorn va presque devenir ce qu'il abhorre afin de sauver sa sœur adorée et Le Chant d'Ekhirit
Pas sûr qu'Olivier May réponde à la question dans sa novella. En effet, il ne met en situation qu'un exemple de victime de la pédophilie. Les parents de Maya correspondent à l'image qu'on peut se faire de ceux à qui on a arraché un enfant : ils refusent d'accepter l'idée de sa disparition définitive, croient à son retour possible et ne peuvent que s'en remettre aux autorités dont les enquêtes ne sont pas toujours efficaces. Le fils est un cas à part, dans un univers d'anticipation qui diffère du nôtre justement dans les éléments qui vont lui permettre de sauver sa sœur. Et notamment des éléments fantastiques. On ne croit donc pas vraiment à l'histoire qui nous est racontée, même si elle est touchante.
Touchante ne veut toutefois pas dire à laquelle on adhère. S'il est plutôt plaisant, avouons-le, de voir des pédophiles être punis pour leurs crimes, la méthode employée fait fi de tout respect des droits de chacun à un procès honorable. Dans Le Chant d'Ekhirit, la victime devient bourreau. La novella est donc à aborder avec recul. L'histoire souffre en effet de son format court. Le sujet de la pédophilie et de la vengeance personnelle est trop sensible et complexe pour s'y risquer avec la forme de la novella sans qu'il y est quelques pierres d'achoppement : Jon a une psychologie présentée trop superficiellement et apparaît comme un héros qu'il n'est finalement pas, les seuls pédophiles apparaissant ne sont pas des malades mais des hommes qui contrôlent parfaitement leurs tendances perverses, on n'a aucun regard sur les enfants victimes et ce qu'ils ressentent, et caetera.
Le Chant d'Ekhirit a le mérite d'aborder un sujet sensible, mais Olivier May n'a pas choisi la bonne forme pour cela et il échoue à livrer un ouvrage qu'on pourrait prendre en exemple pour lancer sainement un débat.
Il reste toutefois une histoire divertissante, qu'on prend plaisir à lire. pose donc cette question : jusqu'où serait-on prêt à aller pour sauver ceux qu'on aime, quel prix serait-on prêt à payer ?