Et cette porte, là-bas, qui se fermait...

Pierre Gévart est un homme aux multiples facettes. Sous-préfet dans le quotidien, il est également le rédacteur en chef de la revue de SF Galaxies. Auteur prolifique, il a aussi bien signé des essais comme Réussir ses notes de synthèse, Les enjeux de la décentralisation ou bien Guide de lecture rapide, que des livres de littérature générale (La Grève au soleil, Le Rendez-vous de Marrakech...), et des pièces de théâtre. On citera pour les planches Suicide d'un auteur dramatique, Léo qu'a dit, Gazole, Panique au cirque ou Crépuscule impérial. Il est d'ailleurs le président du festival de théâtre lyrique Les Malins Plaisirs. Pour la science fiction, outre son rôle de rédacteur en chef de Galaxies, il a également été l'organisateur des 33ème et 36ème Convention nationale française de science-fiction. Des activités qui s'accompagnent de plusieurs romans et recueils essentiellement chez Eons : Hors Saison , la Décroisade, Serlyne  ou bien Celui qui l'attendait.

Les amants terribles...

Et cette porte, là-bas, qui se fermait... est une variation sur le mythe d'Orphée et d'Eurydice, un thème que Pierre Gévart avait déjà évoqué en 2002 dans son livre Orphée, Eurydice... aux éditions du Ver luisant. Il nous raconte l'histoire d'un couple portant le nom des deux héros antiques et qui se déchirent à notre époque. Lui est journaliste et surtout alcoolique et jaloux. Il craint, il soupçonne, que sa douce Eurydice profite de ses absences pour le tromper. Elle, prof de lettre, étouffe sous la surveillance de son amant. Elle aimerait bien qu'il ne boive pas autant. Elle aimerait respirer, se sentir libre.

L'ambiance est donc de plus en plus délétère entre eux, chacun ne supportant plus les petites manies de l'autre. Ils s'enfoncent dans une spirale négative d'où rien de bon ne peut sortir. Quant au lecteur, il ne sait plus vraiment si ce sont deux jeunes gens ayant hérité de prénoms trop lourds pour eux, ou les véritables incarnations des personnages de l'Antiquité. Pierre Gévart ne cesse de rappeler le mythe dans lequel Orphée va aux enfers chercher Eurydice mais se retourne vers elle avant de quitter l'endroit maudit. Un mythe qu'il transpose de nos jours pour mieux le déstructurer, le déformer de toutes parts et en rendre l'aspect dramatique, le couple qu'il met en scène construisant son propre enfer.

Positif.

Malgré les quelques sourires qui ponctuent cette Novella, sixième livre des éditions Argemmios, il faut aimer les ambiances lourdes pour pleinement apprécier Et cette porte, là-bas, qui se fermait... de Pierre Gévart. C'est un drame qui se construit sous nos yeux, avec des déchirures et des pleurs. Un drame qu'il maitrise parfaitement de bout en bout. On aimera ou pas la thématique, aux frontières des genres de l'imaginaire, mais c'est au final une petite réussite pour cet auteur multicartes chez un jeune éditeur, Argemmios, à surveiller de près.