Le Feu de la discorde

Voici le quinzième album de La Compagnie des Glaces, l'adaptation BD par le Studio Jotim du célèbre et copieux cycle de G.J. Arnaud. Le Feu de la discorde est le troisième tome du troisième sous-cycle La Compagnie de la Banquise, que les héros, Lien, Yeuse, Jdrien, ont commencé en ordre dispersé. Dans l'album précédent, il était question d'une guerre ouverte entre Lien et Lady Diana autour du tunnel subglaciaire reliant les pôles. Ici, les projecteurs sont braqués sur Jdrien et Yeuse.

Le cycle se poursuit. Les compagnies ferroviaires continuent de tracer leurs lignes à travers la glace qui a recouvert le globe depuis l'explosion de la lune. À Whaler Station, le Kid (le Gnome du Cabaret de Miki) attire avec le projet de Titanpolis un grand nombre de voyageurs venus de différentes compagnies, mais la discorde va enflammer les glaces.

Le nain de Titanpolis

Pour l'heure, Titanpolis n'est qu'un vaste cloaque où la graisse se négocie à prix d'or. Le Kid, qui souhaite remplacer Lien dans le cœur de Jdrien, l'enfant télépathe, a rendez-vous avec le Mikado pour inaugurer ses nouveaux bains. Ce dernier est prêt à aider le nain dans son projet de Compagnie de la Banquise, une compagnie humaine, favorable à l'essor de l'éducation et de la culture.

Mais tout le monde n'est pas favorable au projet du Kid. Les agioteurs ne souhaitent pas que son pipeline d'eau chaude arrive jusqu'à Whaler Station. Les retrouvailles de Jdrien et de Yeuse ne les empêcheront pas de mettre la station à feu et à sang. Mauvais début pour Titanpolis.

Sales faces (Il aurait fallu que...)

Faire vivre une série de BD SF sur des dizaines d'albums est une vraie gageure. Les éditions Dargaud et le studio Jotim ont relevé le défi et le résultat est mitigé. S'il n'est pas totalement indispensable d'avoir lu les 14 premiers tomes pour lire le quinzième, c'est tout de même préférable, pour en apprécier toutes les subtilités. Les petits encarts des premières pages intérieures sont, à cet égard, fort utiles.

Ce quinzième album est centré sur la guerre économique dans laquelle est plongé l'ex-patron du Cabaret de Wiki. Les Roux, ces personnages mutants centraux de la série, n'y jouent qu'un rôle mineur. Il s'agit d'un moment de crise fondateur pour Titanpolis, mais en dehors des retrouvailles presque fortuites, les relations entre les personnages principaux évoluent peu.

La production est le fruit d'une division du travail étendue : Pascale Sorin et Philippe Bonifay au scénario, André Le Bras, Philippe Gourga et Tregis pour les décors, Blake Ice pour la narration graphique, Josselin Fosset pour les personnages.  Sans originalité, le découpage est efficace. Les dialogues plutôt bien adaptés. Les décors sont dessinés à gros traits. Les personnages ne sont pas d'une grande facture. Les visages varient suivant les angles. Les profils sont particulièrement mal rendus. Les deux premières pages où les visages sont cachés par des masques sont les mieux dessinées de l'album. La couverture, elle, est réussie. Ces têtes (qui ne sont pourtant ni inexpressives, ni rigides) donnent l'agaçante impression d'osciller entre deux styles, comique et réaliste. La faiblesse du trait donne un peu le sentiment d'une série au rabais, où la productivité prime sur la qualité.

Les mauvaises langues diront : « mais c'est comme la série SF d'origine ». Laissons-les dire...