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Polak

Igor Dedic ( Auteur), Mathilde Danton (Coloriste)
Aux éditions :   -  Collection : 
Date de parution : 31/12/09  -  BD
ISBN : 9782723468428
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Christian   - le 31/10/2017

Polak

Après les Beaux-Arts d'Avignon et l'école des Gobelins, Igor Dedic a longtemps œuvré dans le dessin animé. Il signera un premier scénario en 2004 pour La Grande purge. Mais il fera sa véritable entrée en BD avec la création de la série Secrets de sang, dont il scénarise et dessine deux albums chez Casterman en 2005 et 2006. Ces deux premiers albums sont prometteurs tant sur le plan du scénario que du dessin.

Avec sa nouvelle série, Genuine City, mise en couleurs par Mathilde Danton, dessinatrice de La Grande purge, il confirme tout le bien qu’on pouvait penser de lui. Dans un album qui brouille les genres, mêlant fantasy antique, série animalière et SF, il joue en virtuose des corps à corps, des chevauchées aériennes et des architectures géométriques. Le trait est classique, mais il est précis, dynamique, ironique, lyrique et haut en couleurs. Un graphisme classique, mais époustouflant.

Total oblivion

Tout commence dans une belle cité antique en bord de mer. Un combat épique oppose les rouges et les bleus à dos de zèbre, de rhinocéros et d'oiseaux géants. Après la victoire des bleus, les combattants volants vont saluer le zeppelin royal. Dans le ballon trône un despote léonin, Léonidas, qui veut renforcer son emprise sur Genuine City en soumettant, par une intervention magique, un ancien chef rebelle à son service, le fameux Polak. Il en fait, aux yeux de tous, son héros et son garde du corps.

Dans le cirque central, Polak remporte son combat contre les meilleurs gladiateurs de la ville. La garde amazone pèse d'un faible poids face à son art consommé du glaive. Le roi lion décide de le maintenir à l'écart. Mais réussira-t-il longtemps à effacer sa mémoire ?

La Genuine Citix d'Astérix, d'Alix et de Matrix

Un régal pour les yeux. Une leçon de dessin. La fibre d'un Uderzo réaliste. Il y a peu de dessinateurs aujourd'hui qui aient cette spontanéité et cette précision dans le trait. Un réalisme relax, atténué par une distance comique, assoupli par des courbes rondes et des postures naturelles. Un réalisme onirique grâce aux couleurs léchées et contrastées de Mathilde Danton. Un réalisme qui atteint son paroxysme dans le dessin des animaux, des corps humains et des décors. On regrette que les cases soient un peu étriquées, par nécessité narrative, car on aimerait des images grand format et aérées. Car Igor Dedic soigne les détails au point de surcharger parfois les grandes cases. La couverture est en soi un résumé de l'album : une prouesse graphique, par le réalisme de l'oiseau géant, le rendu de la folie de Léonidas, le détail des décors et la superbe tonalité rouge des couleurs. Le premier atout de l'album est son excellente tenue picturale.

Manque d'originalité graphique ? Il n'y a certes pas création d'un nouveau style, mais honnêtement, c'est tellement beau qu'on ne boudera pas son plaisir. C'est un peu comme, au cinéma, dénoncer l'impersonnalité d'Avatar. Oui, l'image est déjà vue, il n'y a pas de prise de risque graphique, mais pousser l'imaginaire à un tel niveau de réalisme, c'est une vraie performance. Genuine City est beau.

Le scénario est plutôt en accord avec le dessin. Il ne se prend pas au sérieux, il est foisonnant et d'une excellente tenue. Dedic prend le parti de mêler les genres et les références, d'Astérix à Alix en passant par Matrix ou De cape et de crocs. On entame la série sur de la SF, à vocation antique et steampunk (le zeppelin), on poursuit par du médiéval, de la magie, de la politique fiction, on finit le premier album sur de la SF matrixienne qui nous renvoie justement au film Avatar. C'est tout à fait plausible pour un premier album. Cette hybridation donne une certaine tonalité innovante à la série. Il va être plus compliqué de rendre tout ça cohérent. On se souvient que le second album de Secrets de sang avait perdu un peu le souffle du premier.

La narration graphique est d'une très bonne tenue. Il n'y a pas de grande originalité, mais les enchaînements sont visuellement efficaces. La scène du combat avec le gladiateur-chien Pitt est très réussie. Les quatre pastilles qui marquent l'entrée en arène de Polak sont excellentes. Il y a un vrai travail de narration, qui aurait, lui aussi, gagné à s'autoriser certaines cases plus larges (scènes aériennes, descente du ciel magique de Polak). Certains textes auraient mérité d'être moins minuscules (l'influence d'Alix ?).

Genuine City, c'est de la super production, oui, mais c'est une telle délectation...

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