La Douane volante

A l'origine orienté dans l'illustration, François Place s'est essayé à l'écriture dès 1992 avec Les Derniers Géants. Ses oeuvres, parmi lesquelles l'Atlas des Géographes d'Orbae, ont reçu de nombreux prix récompensant son talent d'auteur.

A l'aube de la première guerre mondiale, Gwen le Tousseux, un jeune orphelin, reçoit la visite de l'Ankou. L'ouvrier de mort ne vient pas l'emporter dans l'au-delà, mais dans un monde merveilleux et dangereux, dominé par la douane volante, sorte de police aux pouvoirs incroyables. Un monde duquel Gwen doit fuir à tout prix...

Légende du bout du monde

La Douane volante est un roman sidérant à plusieurs égards. Loin des sentiers battus ultra-codifiés du roman jeunesse, François Place plante discrètement un décor ambigu, mêlant l'émerveillement et l'effroi, un décor du bout du monde : la Bretagne, terre de légendes en clair-obscur, dépeignant la beauté désespérée d'un monde, celui de Gwen, précipité dans la cruauté de la guerre, et l'inéluctabilité de la fin de l'innocence. Ici l'Ankou satisfait tout entier à la fonction qui est la sienne dans l'imaginaire collectif, un guide, le psychopompe que l'on retrouve dans tous les récits mystiques à travers le monde, depuis Charon jusqu'à l'ange Uriel en passant par la celte Epona. Il accompagne Gwen dans une quête initiatique pleine de mystère, dépeinte avec toute la tendresse propre à François Place.

Démons et merveilles

Le style de François Place balance constamment entre des atmosphères et des sentiments contrastés. On pourrait parler de La Douane volante comme d'un roman de la maturité : démons et merveilles accompagnent Gwen dans l'âge adulte. Confronté à la terreur, secondé par l'amitié et l'amour, Gwen apprend sous la plume toujours délicate et poétique de son auteur que tout a un prix et que rien n'est acquis, que ce qui nous fascine l'espace d'un instant peut tout aussi bien nous tuer l'instant suivant. Mais notre héros a la volonté d'un breton, la volonté d'une personne seule contre le monde prête à tout pour rester libre, affrontant un ennemi chimérique, la douane volante, et un autre on ne peut plus réel, la cruauté des hommes.

Un récit émouvant et à la beauté lyrique qui confirme le talent de François Place, barde des temps modernes.