Le Meilleur des mondes possibles et autres nouvelles
Plus de quarante ans après la sortie des Machines à bonheur (1964) de Ray Bradbury, Folio SF avait réédité ce livre, en 2008. Deux ans plus tard, l'éditeur a sélectionné cinq des vingt et une nouvelles du livre pour paraître dans un recueil de la collection Folio 2€. Une façon de conquérir un plus large public. Pari réussi pour Galllimard. Une fois le petit livre de cent vingt trois pages bouclé, on a incontestablement envie d'en lire plus...
De belles rencontres
Cinq nouvelles. Cinq petits bonheurs. Ceux qui ne connaissent pas Bradbury ne prennent pas de risques avec ce petit Folio à 2 euros. La sélection des récits est plutôt judicieuse.
L'incontournable histoire du "petit tambour de Shiloh" ouvre le recueil. Ce jeune garçon propulsé sur un champ de bataille rencontre un soir le général des troupes. Celui-ci lui tient un discours de veille de bataille. La postérité du garçon n'en sera que plus grande s'il tient bien son rôle de tambour... Le lecteur s'attache à cet enfant, et Ray Bradbury, tout en subtilité et en poésie le laisse imaginer la suite de l'histoire.
Dans sa seconde nouvelle, "Et le marin de retour de la mer", l'auteur raconte l'histoire d’amour d'un marin vécue sur le tard. Prisonniers de ses suspicions, il perdra sa compagne et finira par en mourir lui-même. Une fois de plus, la fin de l'histoire est surprenante et l'auteur cherche à emmener le lecteur dans autre monde imaginaire où il est possible de fantasmer toutes les chutes possibles de l'histoire.
"La femme illustrée", autre récit du recueil peut être vue comme une critique toujours d'actualité de la société. Cette femme veut grossir pour garder son mari car celui-ci dessine des tatouages sur chaque parcelle de son corps. Si elle n'a plus de place, son mari ne sera plus amoureux d'elle. Dans un monde où la maigreur est vu comme un standard de beauté, il est bon d'être décomplexé par les histoires de Bradbury.
Les deux nouvelles "Un rare miracle d’ingéniosité" et enfin "le meilleur des mondes possibles" clôturent ce livre en beauté ! L'avant-dernière histoire raconte celle de deux frères cherchant à s'enrichir. À cause de leur "âme pure", ils n'y arrivent pas et se font sans arrêt piquer leurs idées. Jusqu'au jour où l'un d'eux découvre que la "pureté de l'âme" peut être un atout. Rien n'est dit dans cette nouvelle, tout est suggéré par l'auteur. A nous,lecteur, le choix de l'interprétation. Enfin, la bien nommée " le meilleur des mondes possibles", aborde un thème universel : la recherche de sa moitié. En l'occurrence, ici, une femme. Celle qui nous chavire le cœur rien qu'avec son parfum...
Un savoureux recueil
On pourrait croire qu'il est facile de dévoiler toutes les ficelles des nouvelles de Bradbury tant certaines sont courtes. Ce n'est pas le cas. La poésie et le monde imaginaire de l'auteur amènent chaque lecteur à sa propre interprétation et à son vécu. L'écrivain sait raconter des histoires qui font réfléchir. Son récit est atemporel. Loin d'être périmé, malgré l'écriture datant des années 60, certains sujets faisant référence à des croyances universelles ou à des sujets encore d'actualité.
Seul bémol pour ce folio … la couverture ! Des chaussures multicolores … Pourquoi cette couverture « girly »? Certes, la femme prend beaucoup de place dans "Le meilleur des mondes possibles" mais de là à en faire une métaphore de chaussures flashy...
Malgré tout, (et une fois la couverture ouverte), on se laisse aisément embarquer par ce petit recueil pour un grand voyage !