Encyclopedia Diabolica, tome 1
Christophe Kourita est un auteur de BD franco-japonais. Ayant vécu au Japon jusqu'à 17 ans, c'est en France qu'il publie ses premières planches (Mashémalo), avant de revenir au Japon pour travailler pour des magazines comme Morning ou Young Champion. Il travaille aussi pour la télévision et développe des projets de série d'animation.
Les yôkai adaptés à la sauce française
Encyclopedia Diabolica témoigne de cette double culture japonaise et française. Kourita y transpose le mythe des yôkai, créatures surnaturelles entre esprits et monstres qui infusent le folklore japonais, aux particularismes régionaux français. À travers une douzaine d'histoires courtes, l'auteur voyage de Paris à la Bretagne, de l'Alsace à l'Auvergne, du Nord à la Loire, inventant à chaque étape un yôkai adapté aux légendes locales. Accompagné par le Professeur Lafayette, yôkaiologue, le lecteur est invité à découvrir cette faune bien particulière.
À noter, l'ouvrage dispose d'un prestigieux préfacier : Jiro Taniguchi. Les connaisseurs apprécieront.
Un album à l'intérêt bien ténu
D'une certaine manière, Christophe Kourita atteint son objectif avec Encyclopedia Diabolica : nous faire découvrir un pan de la culture japonaise, en la fusionnant de façon plutôt réussie avec les traditions françaises. Mais si l'on prend les histoires une à une, elles sont quasiment toutes décevantes. Certes, il y a de bonnes idées, et l'imagination de Kourita ne démérite pas. Mais ces idées sont trop peu exploitées, vite dévoilées et conclues, si bien que l'on n'a pas le temps de s'y intéresser véritablement. Le ton du récit, celui du conte, dessert l'inventivité de l'auteur : celui-ci raconte ses histoires sans passion, alignant des faits qui s'enchaînent sans suspense. Le côté didactique (le fil rouge incarné par le Professeur Lafayette) se veut humoristique, mais cela ne fonctionne pas. La dernière histoire, Le Roi Yôkai, frise même le ridicule avec cette « Yôkai TV », bien qu'elle soit sauvée in extremis par une critique en demi-teinte de la médiatisation à outrance qui prive de substance tout phénomène ou événement.
Le dessin ne relève pas l'intérêt de la BD. Il ressemble trop au graphisme institutionnel des BD ou tracts publicitaires régionaux pour vanter les mérites touristiques d'une région. Sans personnalité, il hésite entre le kitsch assumé et la modernité. L'effet voulu était sans doute de coller aux stéréotypes des contes, auquel cas on pourrait dire que le but est atteint. Mais tout cela manque, comme les intrigues, d'émotion.
Au final, Encyclopedia Diabolica est une BD d'un intérêt bien ténu. Malgré une bonne idée et une fenêtre ouverte sur la culture japonaise, elle ne parvient pas à captiver.