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Espace

Stephen Baxter ( Auteur), Roland C. Wagner (Traducteur), Sylvie Denis (Traducteur), Alain Brion (Illustrateur de couverture)
Aux éditions :   -  Collection : 
Date de parution : 10/02/11  -  Livre
ISBN : 9782266189804
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chloe   - le 31/10/2017

Espace

Stephen Baxter, lui-même scientifique de formation, transmet à ses lecteurs sa soif de savoir et de réflexion sur l'univers, ses origines et son exploration, tout en construisant ses ouvrages sur la place occupée par l'espèce humaine et son développement futur.

Après Temps, Espace est le second volume de la trilogie des Univers Multiples.

Univers parallèle

Au cœur de la galaxie, tentant de sauver la vie d’une prochaine vague de destruction, Reid Malenfant se souvient de la Lune, où tout a commencé… L’intrigue d’Espace se déroule dans un univers parallèle à celui de Temps, et débute en 2020. Dans cette version alternative de notre galaxie, Reid Malenfant n’a pas raté sa vocation, mais a bien suivi la carrière d’un astronaute accompli. Cependant sa femme Emma est décédée d’un cancer avant que l’on ne découvre un remède. Le Pied à L’Étrier, quant à lui, est dirigé par Franck Paulis, et la base de lancement se situe au Kazakhstan, l’ancien fief russe. La Lune a été colonisée par les Japonais. Nemoto, une spécialiste nippone de l’astronomie infrarouge, a trouvé trace d'une vie extraterrestre dans la ceinture d’astéroïdes, et en informe Reid Malenfant. Cinq ans plus tard, en 2025, suite à cette découverte sans précédent, Franck Paulis prépare une mission pour le Pied à l’Étrier, sponsorisée par le Vatican, qui consiste à envoyer le « Giordano Bruno » (surnommé le « Gros Booster Stupide) » dans les astéroïdes, afin de rechercher une vie extraterrestre, par le biais d’une sonde robot.

Effet papillon

Espace débute comme un jeu de miroirs avec Temps. Les enfants bleus ne sont plus, ni les gens de l’aval, mais la vie est bien plus riche dans cet univers-ci. Le paradoxe d’Enrico Fermi n’a enfin plus lieu d’être. En effet, l’humanité n’est pas seule, comme l’a démontré Nemoto par sa découverte. Mais est-ce une si bonne nouvelle ? Pourquoi les Gajins, terme japonais signifiant « étrangers » et utilisé pour nommer les extraterrestres, ne se manifestent-ils pas et ne communiquent-ils pas avec l’humanité ? Quelles sont leurs intentions ?

Comme dans le premier volume de cette trilogie, où les différents comportements humains à l’annonce de la proche fin du monde s’opposaient, les réactions divergentes face à la découverte d’une vie extraterrestre divisent ici l’humanité : les « millénaristes » accueillent cette nouvelle comme un avènement, alors que les « catastrophistes », méfiants, ont peur de ces nouveaux venus.

Le voyage dans l’espace-temps devient possible grâce aux points selles, ces portails temporels aux origines méconnues, qui désintègrent ceux qui passent au travers, les gardant en mémoire pour les reconstruire à l’identique de l’autre côté. Ce qui crée d’ailleurs un paradoxe pour ces voyageurs temporels, qui reviennent dans un monde inconnu, tous leurs contemporains depuis longtemps décédés, car le temps ne passe pas de la même manière pour les uns et pour les autres. Ces voyageurs de l’espace souffrent également du syndrome de la Discontinuité, avec perte de la sensibilité et des sensations corporelles. D’autres phénomènes font leur apparition, comme ces « gérontocrates », qui se maintiennent en vie pendant des siècles grâce à des traitements de longévité. Espace est riche en analyses et descriptions du comportement humain face aux épreuves et au changement.

On retrouve dans Espace une grande partie des personnages principaux de Temps, dont les vies vont également être mêlées dans ce second volume (Reid Malenfant et Maura Della, par exemple), mais dans un contexte et des rôles différents, voire opposés. Bien évidemment, d’autres protagonistes font également leur apparition, et non des moindres, comme Nemoto ou Madeleine Meacher, qui jouent un rôle crucial tout au long des différents chapitres, étalés dans le temps.

Relativité

Car si Espace débute en 2020, le roman s’achève bien des siècles plus tard, et ne manque pas d’introduire des digressions temporelles, jouant sur l’espace-temps, à tel point que ce second volume aurait peut-être encore mieux porté le titre de « Temps » que le premier. Le lecteur est sans arrêt confronté à des allers-retours temporels, ce qui complique un peu le déroulement de l’histoire, mais illustre bien la relativité du temps.

Le grand talent de Stephen Baxter, à son apogée dans le précédent tome, ne faiblit pas avec Espace. Il excelle à nouveau dans la description de la galaxie et de ses planètes. La représentation de Vénus, lors de l’expédition de Carole Lerner en 2081, en est un bon exemple. Très imagée, elle semble extrêmement réaliste mais tout aussi poétique, tout comme la description d’une Terre moribonde dans le lointain futur, abîmée et pourtant toujours belle dans son étrangeté. La Terre n’est d’ailleurs pas la seule à changer irrémédiablement : c’est également le cas de l’humanité et de ses représentants, dispersés sur le monde glacé de Triton, les stations-arbres orbitales, Mars, Mercure ou la Lune à l’atmosphère ténue.

La dimension métaphysique, présente dans tous les textes de Baxter, ne fait pas non plus défaut, tel « Le Temps du Rêve » des aborigènes australiens, et leurs lignes de chants ayant construit le monde, ou à travers ces fleurs de verre de la Lune, qui vivent à rebrousse-temps. En rendant en partie hommage à 2001, l’Odyssée de l’espace, Stephen Baxter s'inscrit dans une même réflexion sur le devenir et l'origine de l'espèce humaine.

Autre grande force de l’auteur, nous donner à lire des extraterrestres tout à fait différents des humains, non pas dans une opposition basique ou en tant que reflet de l’être humain, mais bel et bien en tant qu’entité mystérieuse et en partie incompréhensible, avec une psychologie et un mode de fonctionnement autres.

Histoire sans fin

Bien que parallèle à celui de Temps, l’univers d’Espace est paradoxalement plus pessimiste. Malgré la profusion de vie, en rien comparable à l’isolement de l’humanité dans le premier volume, la fatalité du destin semble engluer les différentes espèces dans une répétition tragique. Mais l’espèce humaine a ici encore une place centrale dans l’évolution de l’univers, de par son aptitude à la transcendance et au dépassement de soi, avec bien évidemment Reid Malenfant au tout premier plan. Roman très riche et complexe, construit sur de multiples allers-retours dans le temps, Espace ne se finit pas tout à fait, à l’image du premier volume des Univers Multiples. À suivre avec Origine, le dernier tome de cette trilogie, qui propose une troisième interprétation de l’univers et des aventures du cadet de l’espace.

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