Livre
Photo de Roublard

Roublard

Terry Pratchett ( Auteur), Patrick Couton (Traducteur), Paul Kidby (Illustrateur de couverture)
Aux éditions :   -  Collection : 
Date de parution : 24/10/13  -  Livre
ISBN : 9782841726509
Commenter
AnneSophie   - le 31/10/2017

Roublard

Pratchett, considéré comme le second auteur vivant préféré des Britanniques, est surtout connu pour sa série de romans de fantasy parodique, Le Disque Monde. Et pourtant, il ne faut surtout pas passer à côté des autres romans qui ne sont pas inscrits dans ce cycle, surtout si vous aimez sa griffe. Roublard ne déroge pas à la règle : humour décalé, personnages rocambolesques, tout y est avec une spécificité de taille… Ici, Pratchett convoque des personnalités telles que Charles Dickens, Sweeney Todd, ou encore la reine Victoria. Tout ce beau linge est réuni autour d’un jeune gars des égouts, Roublard, qui, niveau faits d’armes, n’a vraiment rien à leur envier !

Une fantasy historique

Nous sommes à Londres, dans les années 1850. Roublard est un ravageur, un jeune orphelin qui fouille la boue des égouts pour dénicher piécettes et bijoux égarés. Il est hébergé par Salomon, un réparateur juif qu’il a sauvé d’une bande qui le passait à tabac. Eh oui, Roublard ne manque pas de courage et d’honneur. Lorsqu’il voit plusieurs hommes s’en prendre à une jeune femme, il n’hésite pas à se jeter sur eux pour la sauver. C’est ainsi que commence son aventure. La demoiselle, qui se fait appeler Simplicity, s’avère être une belle en fuite, et Roublard va devoir user de malice pour ne pas se faire trucider par ceux qui la recherchent.

Roublard nous offre une formidable galerie de personnages, avec bien sûr, le sieur Dickens en tête… Charlie pose bien des problèmes à Roublard quand ils se rencontrent… Il ne sait pas quoi penser de ce drôle de bonhomme, qui sort son carnet de notes à tout bout de champ et utilise des métaphores dont le sens lui échappe complètement. Un grand ami de Dickens est aussi très présent, Henry Mayhew, auteur du London Labour and the London Poor, reportage sur la vie des populations pauvres de Londres à l’ère victorienne. On croise aussi d’autres personnalités, peut-être moins connues du lectorat français. Il y a le chef de la police londonienne, Robert Peel, mais aussi Benjamin Disraeli, premier ministre de l’époque qui descendra dans les égouts avec Roublard et Dickens !

Mais alors, celui qu’on adore retrouver dans le roman, c’est l’effroyable barbier de Fleet Street, Sweeney Todd ! Roublard a le malheur de se rendre chez lui pour se faire rafraîchir sa coupe et la scène que nous décrit Pratchett est géniale. Le barbier, complètement halluciné, revit un souvenir où il était chirurgien sur un champ de bataille. Notre Roublard ne perd pas de son sang-froid et lorsque les peelers débarquent, il passe pour un véritable héros !

Mais Pratchett ne s’intéresse pas qu’aux nantis de cette société victorienne, bien au contraire. En suivant Roublard, on découvre toute cette frange de gens qui vivaient dans une extrême pauvreté : voleurs, petites frappes, filles des rues, marchands ambulants… Des notes de bas de pages nous renseignent même sur certaines coutumes de l’époque … On est immergés en pleine époque victorienne, comme si l’on lisait un Dickens ! Mais tout cela est fait à la sauce Pratchett avec des scènes drôlissimes.

Dickens à la sauce Pratchett !

Ainsi, comme dans tout bon Pratchett, l’humour est bien présent, grâce à de nombreuses scènes décalées. Roublard, en plus de savoir se battre et de connaître les égouts comme sa poche, est un as du déguisement ! À plusieurs reprises, il se grime en petite vieille acariâtre, qui fait tourner en bourrique tous ceux qu’elle croise. Plus tard dans le roman, notre héros a une idée de génie pour tromper les poursuivants de Simplicity, sauf que son plan va nécessiter la présence d’un cadavre…

Certains traits de la personnalité des personnages sont aussi hilarants. Salomon, bien que pratiquant, relativise toujours l’importance de la religion et pense que Dieu saura se montrer compréhensif. Évidemment, plein de bons mots parsèment l’ouvrage – merci au talentueux traducteur ! –, et je ne résiste pas au plaisir de vous en citer quelques-uns : « On ne voit jamais de ravageur juif – on trouve des ravageurs pas chers, mais casher, non ! » ou encore « - C’est un peu serré à l’entrejambe, signala Roublard. – Alors évite les pensées impures le temps que ça se détende, conseilla Jacob. » Et il y en a tant d’autres ! Une dernière pour la route : le chien du roman s’appelle Onan… Comme Pratchett, je vous laisse aller voir la petite histoire de ce personnage biblique…

Roublard se lit donc avec grand plaisir, avec peut-être un petit bémol… On a parfois l’impression que l’auteur se perd dans l’intrigue, qui perd en intensité au fil du roman. Finalement, l’irruption de Simplicity dans la vie de Roublard n’est qu’un prétexte à de nouvelles rencontres et à des situations marrantes. Il y a bien quelques combats et affrontements avec les méchants, mais finalement, ce n’est pas le plus important. Pas de fantastique non plus dans cet ouvrage, hormis peut-être la supposée présence d’une « Dame des rats » dans les égouts qui apparaît aux « honnêtes » ravageurs…

Cette édition possède évidemment des petits dessins de Paul Kidby à chaque début de chapitre et à la toute fin se trouvent quelques page fort instructives de la part de l’auteur.  Il dédie son livre à Mayhem et l’on voit qu’il se sent très concerné par la pauvreté qui régnait à cette époque. Il explique aussi ce qu’il a voulu faire avec Roublard et que l’ouvrage est « une fantasy fondée sur une réalité ».

Genres / Mots-clés

Partager cet article

Qu'en pensez-vous ?