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Immortel

Laurent Philibert-Caillat (Traducteur), Catherynne M. Valente ( Auteur), Beth White (Illustrateur de couverture)
Aux éditions :   -  Collection : 
Date de parution : 28/02/14  -  Livre
ISBN : 9782809438505
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Hermine   - le 31/10/2017

Immortel

Catherynne M. Valente est une poétesse, romancière et critique littéraire américaine. Encore peu traduite en France, elle accumule pourtant les prix et distinctions, avec notamment trois Prix Locus en 2012. Avec Immortel, paru en 2014 chez Panini dans la collection Éclipse, elle reçoit une nomination au prix Imaginales du meilleur roman étranger 2014 du festival d'Épinal.

« Des dizaines et des dizaines de pamphlets du Parti tapissaient les parois de terre, retenant pierre et boue. Les travailleurs n’ont rien à perdre que leurs chaînes ! criait le dessin d’un homme au visage grave, poing tendu. » 

Kochtcheï est immortel, dangereux et amoureux. Il est également le Tsar de la Vie et il a jeté son dévolu sur Maria Morevna, une jeune Russe, fille de la Révolution soviétique et capable de voir l’envers du réel, de percevoir la magie à l’œuvre. Elle quitte alors son monde pour rejoindre les terres magiques de Bouïane, avant de finalement y revenir, sans son mari, durant le siège de Stalingrad, alors que l’éternel combat entre Kochtcheï, Tsar de la Vie, et son frère Viy le Tsar de la Mort, est peut-être sur le point de s’achever…

Un roman à lire absolument, ne serait-ce que pour les lutins stalinistes…

Ce roman « mythpunk » (pour reprendre la dénomination de C. M. Valente) combine en effet habilement des éléments du mythe et du folklore russes en les associant à des sujets et considérations plus modernes. Les Tsars des différents éléments côtoient donc des lutins (ou domoviye) du Parti, Baba Yaga possède bien son pilon et ses pattes de poulet mais visite des usines d’armement et Saint-Pétersbourg change toujours plusieurs fois d’appellation au gré de la Révolution russe. L’association des légendes et d’un contexte historique connu et revisité fonctionne comme un charme et exerce une fascination certaine sur le lecteur, perdu dans une magie soviétique diffuse.
 
Les créatures de la mythologie slave sont dépaysantes (les scènes impliquant le domovoï, esprit de la maison et du foyer, sorte d'elfe de maison vivant derrière le poêle et faisant ici parti d’un komityet sont particulièrement savoureuses), les descriptions saisissantes, le vocabulaire choisi est empreint d’un exotisme irrésistible et l’Histoire rencontre la légende.

Et les personnages forts qu’il convoque…


Bien loin des mièvreries (trop) souvent associées à une histoire d’amour naissante et pourtant intemporelle, les personnages principaux de Maria Morevna et de Kochtcheï sont habilement campés, tour à tour charmeurs, odieux et terriblement attachants. Le lecteur se laisse complètement happer dans ce monde particulier, qui allie le charme de l’ancien à la surprise de la nouveauté. L’auteur arrive donc à insuffler une âme nouvelle au genre du conte et à en proposer une exquise réécriture tout en conservant ses origines (habileté d’ailleurs très bien transmise par le traducteur). Le roman est fluide, original et incroyablement fort.

Alors certes, certains pourront trouver que la (nécessaire) répétition de certains éléments (les événements dans le conte allant par trois…) freine un peu le récit, pour moi elle ne fait que rajouter à l’élégance et à l’âme du roman.

Vous l’aurez compris ce récit est une immense découverte, une bouffée d’air salutaire dans un paysage éditorial parfois trop convenu. Une véritable perle à découvrir des étoiles (rouges) plein les yeux !

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