Le Malformé

Au scénario de ce quatrième tome de la série Oracle nous retrouvons Patrice Lesparre. Ce bordelais de naissance est un romancier, scénariste et dessinateur de bande-dessinée. Il a notamment publié la série Star Power dans le magazine Power Mania. En dehors de la BD, il a écrit avec son ami Olivier Peru la série récompensée Les Haut-Conteurs. Dernièrement, vous pourrez retrouver le tome 3 des Héritiers de l'aube.

Aux dessins nous retrouvons celui qui a illustré Merlin, la Quête de l’Epée, Nicolas Demare. Après un passage par le jeu vidéo en tant qu’infographiste, c’est quelques années plus tard qu’il collaborera avec la collection Celtic et Jean-Luc Istin pour faire ses armes dans la BD.

Amour par-dessus tout.

Melos, ce jeune homme beau et riche, est capable d'attirer toutes les plus belles femmes dans son lit, les célibataires comme les mariées. Mais il n’en vise qu’une seule : Aphrodite, la déesse de l’amour. Alors qu’il est sur le point d’y parvenir, Apollon qui lui a échoué en décide autrement, et lui jette une malédiction qui le rend particulièrement laid et repoussant. Les chances qu’Aphrodite tombe dans les bras de ce malformé rejoignent alors le zéro absolu…

Mais c’était sans compter l’amour fou, déraisonnable, passionné, et inépuisable de Melos pour Aphrodite ! Prêt à tout pour retrouver sa place dans le cœur de la déesse, il étudiera avec acharnement l’art subtil de la cuisine, du mélange et des alliances des épices, des senteurs et des saveurs. Il espérera secrètement pouvoir ainsi la séduire à nouveau, par un autre moyen que sa beauté.

Aidé par les Satyres et les Ménades, il prendra des années pour arriver à ses fins, et peut-être prendre enfin sa revanche sur Apollon…

Obsessionnel amour !

Pour ce quatrième et avant dernier tome de la série Oracle, le scénario s’oriente vers une histoire à la fois fascinante, psychologique, intense et tragique. Melos est le protagoniste central, et les pages se succédant, il prend en profondeur. Petit à petit le lecteur est amené à mieux comprendre ses motivations, à l’intersection de son amour obsessionnel et de la vengeance. Il est travaillé avec finesse, et à travers son physique disgracieux en ressort un être profondément humain, tourmenté, mais capable de trouver les ressources nécessaires pour rebondir malgré les épreuves.

Le dessin est à l’image du scénario : fascinant. Les plans rapprochés se succèdent, et la part belle est faite sur le détail des visages et des corps. Les uns seront heureux d’y découvrir des femmes et des Ménades aux courbes avantageuses et gracieuses ; et les autres y découvriront des hommes aux corps d’athlètes (mais hélas pas pour Melos). Les expressions sont traitées avec brio, permettant au lecteur de saisir chacune des émotions, et de se plonger alors dans cet univers.

Le travail est peut-être moins précis sur certains décors. Si la forêt de Corinthe et son ambiance sont magiquement dessinées et happent le lecteur, tout autant que les pays que traverse Melos, les bâtiments quant à eux souffrent d’un manque de détails. Fort heureusement, il ne s’agit là que d’une grande minorité de cases, et cela ne gâche en rien le plaisir visuel de l’ensemble !

Le tout est alors un tome à la hauteur des précédents, dans la lignée d’une série de qualité qui touche bientôt à sa fin. L’unité avec les tomes antérieurs est maintenue, tant sur le plan du dessin (sans pour autant enlever la touche de Demare), que sur le plan du scénario. Un bien bel album !