Lanvil, mégalopole caribéenne à la pointe de la technologie, vitrine rutilante des diversités culturelles, s’élève de plus en plus haut, et oublie les trames qui se tissent en son sein. Pat et sa bande de débouya vivent de magouilles et de braquages. Joe et Patson courent de galère en galère, poursuivis par les flics. Ézie et sa sœur Lonia, traductrices, infiltrent les hautes sphères des corpolitiques. Toutes et tous rêvent en secret de retrouver la terre de leurs ancêtres, le Tout-monde, enseveli quelque part sous le béton. Pour y parvenir, un seul chemin : faire tomber les murs entre l’anba et l’anwo, et renverser l’ordre établi. Roman choral irrigué par une langue hybridée et vibrionnante, Tè mawon ouvre la voie à une science-fiction caribéenne francophone, inventive et décoloniale.
Les Caraïbes à la pointe du choc du futur
Bienvenue à Lanvil, mégalopole futuriste où les populations de toutes les origines se mélangent et survivent tant bien que mal, de plus en plus loin de leur terre originelle tant les tours poussent vers le haut. Pat et sa bande vivent d’expédients, Joe et Patson galèrent tandis qu’Ezie et sa sœur Lonia travaillent comme traductrices, essayant d’infiltrer les corpolitiques car la révolte gronde au fond d’elles. Et d’eux aussi. Ils veulent juste tout foutre en l’air et changer le monde : peuvent-ils y arriver ? Et qu’adviendra-t-il de leur envie de changement radical ?
Un roman ambitieux
Paru originellement aux éditions La Volte, Tè Mawon (« terre marron » en créole) se veut un roman choral avec deux femmes et deux hommes qui racontent leur vie face à des multinationales rendues toutes puissantes par la technologie. Là s’arrête l’influence du Cyberpunk tant Michael Roch livre un récit touffu écrit en français et en créole, ce qui n’est pas un problème, où infuse aussi Aimé Césaire. Dystopie tant la critique du système social (les tours rappellent celles d’I.G.H de Ballard et surtout Les monades urbaines de Robert Silverberg) est importante, Tè Mawon s’ancre aussi dans une forme d’utopie par sa peinture de Lanvil, symbole d’une union des Caraïbes et aussi par cette envie de se reconnecter à la terre. Ambitieux et séduisant, ce roman vaut le coup au fond d’être lu.
Sylvain Bonnet