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Le Syndrome du Scaphandrier

Langue d'origine : Français
Aux éditions : 
Date de parution : 31/05/2007  -  livre
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Le Syndrome du Scaphandrier

Voilà une bonne vingtaine d'années que Serge Brussolo persiste à ne rien faire comme tout le monde. Un forcené de l'imaginaire qui est allé jusqu'à publier onze livres dans la même année. Un stakhanoviste qui a toujours su garder son indépendance. Ses armes il les a faites tout à la fois au Fleuve – gardien pourtant jaloux de ses talents – et chez Présence du Futur.

Conséquence opportune du rachat de leur catalogue par Folio, cette réédition du Syndrome du scaphandrier.

Le syndrome du scaphandrier, c'est le danger qui guette tous les plongeurs. La tentation des grands fonds, à l'infini. La décompensation ultime. David Sarella le sait bien, lui qui est plongeur dûment accrédité par l'Académie. Une manière bien agréable de gagner sa vie quand on est un garçon falot et timide. Car lorsqu'il rêve, David devient un as de la cambriole, un casseur de l'impossible, sans cesse plus audacieux, qui ramène à la surface du réel le fruit de ses larcins. Selon la terminologie en vigueur il est un "medium matérialisant des ectoplasmes à durée persistante". Ces fragments de songes arrachés au tissu de ses rêves revêtent l'apparence d'objets vaguement organiques, sortes de bébés difformes, plus ou moins éphémères et qui ont l'étrange propriété de rendre leurs propriétaires heureux. Ici s'arrête la tâche des plongeurs, puisque c'est aux Beaux-Arts de vendre les produits de son imagination.

Bien évidemment, ce n'est pas donner au premier venu de faire ça. Il faut des prédispositions. Et puis il faut de la bouteille… Il faut savoir éviter la panique, pour ne pas remonter de cauchemars. Enfin il faut savoir s'arrêter à temps. Ecouter les psys des Beaux-Arts lorsqu'ils vous disent que maintenant vous plongez trop profondément pour remonter des ectoplasmes, que c'est devenu trop dangereux, et que si vous continuez vous allez finir comme un légume sur un lit d'hôpital, prisonnier entre deux mondes. Car pour survivre dans ce métier, il faut savoir renoncer à ses rêves.

Il est trop tentant de ne pas voir dans Le syndrome du scaphandrier une parabole de la création littéraire, de ne pas se laisser aller à y chercher la part d'autobiographie. Bien sûr Brussolo est un trop vieux briscard pour se livrer tout entier dans un roman. On se dit d'ailleurs qu'en quelques 180 pages, la confidence manquerait singulièrement d'ambition, pour un écrivain aussi prolixe que lui. Mais bon…sous des dehors sibyllins, parfois bricolos (vestiges sans doute de sa période "noircisseur de pages à la chaîne" pour le Fleuve), cette fuite en avant post Grand Bleu fonctionne bien. Serge Brussolo a du métier, et sait trouver les images qui frappent, jouer du cliché pour ensuite le détourner de manière perverse. Son univers très personnel, où Philip K.Dick voisinerait sans complexe avec le Dr Who, s'évanouit la dernière page lue mais en entremêlant les ultimes lambeaux des rêves d'un auteur à ceux de son lecteur.

Une jolie et étrange réussite.

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