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Date de parution : 01/05/2025
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Le voyage de Tchekhov de Ian Watson, un roman de SF riche en rebondissements et autres boucles temporelles !

Il faut bien le reconnaître, Ian Watson n’est pas un auteur facile à lire, et ses points forts ne résident certainement pas dans le rythme et l’aventure ! Ses romans les plus connus, L’Inca de Mars et, surtout, L’enchâssement, demandent un investissement intellectuel assez conséquent. Pourtant, un coup d’œil sur son recueil de nouvelles Chronomachine lente montre qu’il peut faire preuve d’une imagination sombre et riche d’idées originales. Membre de la new wave, le courant littéraire britannique porté par Michael Moorcock et sa revue New worlds dans les années soixante, Ian Watson a remporté l’estime de ses pairs et un bon nombre de prix. De nos jours, il semble malheureusement avoir perdu de son aura et, en dehors de L’enchâssement, ses livres ne font pour l’instant pas partie des opérations de rééditions patrimoniales prioritaires. La quatrième de couverture du Voyage de Tchekhov nous promet, une fois n’est pas coutume pour cet auteur aride, quelques touches d’humour…

Réalisme soviétique et cinéma…

Dans l’Union Soviétique de la fin du vingtième siècle, une équipe prépare dans un but scientifique un film sur le voyage que le dramaturge Anton Tchekhov effectua en Sibérie en 1890. Afin d’élaborer un scénario, le groupe se réunit dans une datcha des environs de Krasnoïarsk. Pour atteindre au maximum de réalisme, l’écriture bénéficiera des techniques d’hypnose avant-gardistes du docteur Kirilenko. Un acteur et sosie de Tchekhov, Mikhaïl Petrov, spécialiste de la vie de l’écrivain, se fera hypnotiser pour vivre en esprit les péripéties du voyage et en rapportera les éléments à l’équipe de rédaction. Des évènements imprévus ne tardent pas à faire dévier la vie du Tchekhov onirique sur une trajectoire de plus en plus singulière. En effet, chaque fois qu’il sort de son sommeil hypnotique, Mikhaïl leur rapporte des éléments qui ne font pas partie de la vie d’Anton Tchekhov telle qu’ils la connaissaient jusqu’à présent. Les occupants de la datcha, isolée du reste du monde par une tempête de neige, commencent à envisager une nouvelle version du film : cette fois, ce sera une fiction qui fera d’eux des artistes de premier plan. Mais les modifications rapportées affectent-elles seulement les rêves de Mikhaïl ou la réalité ?

Le problème, c’est l’absence d’astroblème…

Avec ce sujet éminemment dickien, Ian Watson nous propose une histoire de paradoxe temporel des plus originales, dans un cadre qui change agréablement des histoires situées aux USA, où les personnages ne se nomment pas forcément Bill ou Harry… Le voyage de Tchekhov donne l’occasion d’éclairer (de manière fictive, bien sûr), les causes de la mystérieuse explosion de la Toungouska (Sibérie) en 1908, abattant près de soixante million d’arbres dans un rayon d’une vingtaine de kilomètres et dont les répercussions se firent sentir bien au-delà. Cet évènement reste encore inexpliqué, bien qu’un impact avec un corps céleste en soit la cause la plus probable, même en l’absence de cratère d’impact ou de débris météoriques. Quant à l’hypnose, c’est une technique bien connue en Russie, souvent liée au chamanisme et dont l’intérêt qu’elle suscite concerne des domaines qui vont de la psychothérapie aux techniques de contrôle mental à usage politique... Intéressant à plus d’un niveau, Le voyage de Tchekhov a aussi le mérite de nous rappeler qu’Anton Pavlovitch était un auteur majeur et que ses œuvres justifient largement que l’on s’y intéresse. Riche en rebondissements et autres boucles temporelles, moins aride que prévu, le roman laisse un excellent souvenir et peut constituer une acclimatation en douceur  aux autres textes de Ian Watson. Il n’y manque que l’humour promis par la quatrième de couverture…

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