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Trois bonnes raisons de lire La Descente ou la chute de Basile Cendre
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Trois bonnes raisons de lire La Descente ou la chute de Basile Cendre

Ce matin, on vous donne trois bonnes raisons de lire La Descente ou la chute de Basile Cendre, un roman paru aux Moutons Electriques.

Basile Cendre, « Pépite de l'imaginaire 2021 » est un nouvel auteur, trentenaire, qui vit dans l'Est de la France. Son premier roman, Les Enfants du béton, est paru aux Saisons de l'étrange. L’auteur qualifie celui-ci de « roman d’horreur régionaliste et un hommage aux slashers ». Il est également éditeur pour Courant alternatif, une collection d’ultragauche, « enragée et énervée » et il travaille pour Les Saisons de l’étrange sur du pulp francophone.

Demain. Au bord du précipice, Loup hésite. Il doit choisir entre la Descente ou la Chute.

Sauter pour sombrer dans la brume dans une chute vertigineuse ou descendre de Port-Céleste, sa ville perchoir, et dégringoler les montagnes de décombres entremêlées de ferrailles enfouies et hostiles et de nature en décomposition. Peut-être atteindre les profondeurs obscures où dorment les titans, ces géants corrompus au sommeil éternel... et tourmenté. Il lui faudra éviter les chuchotements vicieux de la brume, l’étreinte froide et violente des Oubliés, et la tentation troublante du vertige. Mais Loup le sent, il y a un secret en bas, une liberté que le ciel plombé des hauteurs lui refuse.

Attention, ce livre n’est pas commun.

Tout d’abord, la couverture et les quelques dessins en noir et blanc à l’intérieur sont de Melchior Ascaride : ils sont magnifiques et tellement bien adaptés au roman. Noir et vert : la brume noire du désespoir et le vert du possible renouveau.

Ensuite, cette histoire est incroyable d’inventivité, dérangeante, surprenante, très noire avec juste une lumière au bout de…

Alors trois raisons de lire ? Pas facile. J’ai pensé à Crash le film de Cronenberg avec ce mariage hors normes de l’acier et de la chair. Il y a aussi un peu de ce souffle dément et de cette quête sans presque fin de La Horde du Contrevent de Damasio.

Mais l’auteur a sa façon à lui toute particulière de convoquer les monstres, réels ou pas, dehors ou au plus profond de l’être humain, dans la houle noire des « vestiges d’un monde perdu » comme le qualifie l’auteur.

L’idée même

Comment donner envie alors que l’idée même du livre est faite pour ne pas être racontée, tellement elle surprend, à chaque page. Il y a l’histoire simple de cet homme, Loup, qui est ferrailleur. LE métier à exercer pour aller se confronter au passé de ce bout du monde en hauteur, en allant dénicher plus bas, dans un épouvantable mélange de restes d’humanité, de métaux attaqués par le temps et de nature atrophiée, des bouts de mémoire. Et celui pour décacheter un bout de la sienne.

L’auteur nous décrit un futur presque inconcevable pour nous aujourd’hui, car fait de femmes et d’hommes en état de survie perpétuelle, entre résignation et lutte contre les ombres angoissantes d’une brume destructrice et un « soleil aveugle », dans un état de dénuement quasi complet, solitaires. Seuls leurs souvenirs et le lien, fort, avec leurs proches les empêchent de sombrer.

Enfin, pas vraiment. Certains s’en sortent moins bien. La galerie des « oubliés », formidables portraits de ceux qui ont abandonné n’est pas à mettre devant tous les yeux. Et pourtant, le tour de force de l’auteur est de nous donner à compatir, à vouloir comprendre.

Les figures de ce temps-là

Ce livre, c’est aussi la recherche d’un homme pour retrouver la femme qu’il aime, Auria, sa « feuille ». Pour cela, il devra affronter les envoyés infernaux des titans qui dorment d’un rêve tourmenté tout en bas. Par touches, passé et présent se confondent presque, pour raconter celle qui a dompté « cette danse suicidaire de funambule sur une poutre portée par le vent ».

Que ce soit dans son village perchoir, ou lors de sa descente, Loup va se heurter à un mélange étonnant d’humains pas toujours bien intentionnés et de créatures cauchemardesques. Je ne suis pas fan des films et livres d’horreur. Mais la façon de Basile Cendre de manier magie, empathie pour les âmes perdues, d’être auprès de celles et ceux qui vont aider Loup à tracer sa route, donne des couleurs à l’énorme prise de risque de celui-ci.

Curieusement, les personnages croisés apparaissent bien réels, dans un monde où les créatures fantastiques semblent décalées, moins palpables, comme relevant d’une mythologie oubliée. Comme un mauvais mirage. C’est intrigant et plutôt bien fait.

Le style très personnel

Basile Cendre a choisi de nous dévoiler ce conte quasi philosophique à la fois par la voix de Loup, et par une forme plus traditionnelle de narration. Loin de plomber l’histoire, ce procédé est manié de main de maitre. On peut trouver parfois que l’auteur utilise de nombreux synonymes pour dire à peu près la même chose. L’atmosphère y gagne en tension même si c’est parfois un peu lourd.

Mais ce que j’ai beaucoup apprécié, c’est que ce monde à l’intersection entre le réel et l’irréel prend forme sous nos yeux, avec un talent d’écriture fort, qui donne à voir ce monde où la verticalité a pris le pas sur le sol habituel des hommes. Un crayon n’y suffit pas. Il faut une imagination et une rigueur dingue pour que le lecteur en fasse un presque film. Les odeurs, les dérapages de Loup, son « fil » qui le relie à son ami Gaston qui oublie d’en dormir pour le sauver d’une éventuelle chute mortelle, les lieux de vie traversés, les attaques effroyables, les tenues de survie, tout cela est extrêmement visuel.

 

J’attends le prochain livre de l’auteur avec impatience. A vous de lire !

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