Ce matin, on vous donne trois bonnes raisons de (re)lire Le Sang de la cité, 1er volet de Capitale du Sud de Guillaume Chamanadjian, paru Aux Forges de Vulcain en avril dernier.
Guillaume Chamanadjian est né en 1980 à Aix-en-Provence. Le Sang de la Cité est son premier roman. A venir en 2022 : Trois Lucioles, deuxième volet de la trilogie Capitale du Sud.
Le Sang de la cité est le premier tome d'une série écrite à quatre mains, La Tour de Garde qui comportera 6 tomes. Trois tomes au sud, trois tomes au nord. C'est à Claire Duvivier que reviendra le rôle de nous emmener du côté de Dehaven, la rigide métropole du Nord en octobre.
Crédit photo : José Cañavate Comellas / @studio81gc
C’est un livre qui m’a donné envie de l’ouvrir. La couverture d’Elena Vieillard ne passe pas inaperçue : elle est chaude et intrigante. Peut-être parce que la ville a l’air…vide.
Or la Cité dont il est question, Gemina, est tout sauf vide. Elle est l’héroïne de ce premier tome. Elle fait penser à une ruche dont les habitants se démèneraient pour y survivre.
Le labyrinthe de la ruche
Il est forcément difficile de commencer une vaste série de fantasy. L’auteur nous convie de bien élégante manière à entrer dans le jeu. Ou plutôt LES jeux.
Gemina est une mégalopole, enfermée derrière deux murailles immenses. Elle est vibrante, pleine de sons et d’odeurs, et vous donne envie de gouter à toutes ses saveurs. Elle est gérée par différents ducs plus ou moins puissants. Mais l’essentiel n’est pas là. Le vrai cœur de la ville, c’est le possible canal qui relaiera le bas de la ville aux quartiers nord. Un rapport de force particulier régit en effet les échanges entre les puissants clans du Massif au centre de la Cité et les ambitieux clans du Port tout au sud.
Le commerce ! Là est l’essence et l’artère de vie de Gemina. Dans ce cadre, Nox, jeune commis d’épicerie, va être de tous les fronts, parfois à son corps défendant. Recueilli avec sa sœur au fond d’une obscure cellule, il va être adopté au sein du duché de La Caouane, la tortue de mer. Surnommé Suceur d’os, il va devenir un outil tranchant dans les mains de son clan, parce qu’il connait la ville comme personne et parce qu’il peut trouver les paroles qui relieront les fils de la cité.
Jeux de pouvoir, jeux retors confrontant la vie et la mort, jeu tout court, La Tour de Garde, un jeu d'échecs propre au monde de Gemina est particulièrement populaire parmi ses habitants, jeux d’influence, l’auteur arrive à s’inscrire d’habile manière dans la lignée de ceux qui peuvent vous donner à voir et à lire vieilles intrigues et nouvelles alliances, complots et trahisons, grâce à un pouvoir évocateur fort et une belle écriture.
La magie de la ruche
Ce qui apparait comme une histoire assez classique de rivalités citadines et commerciales est doublé d’une seconde histoire, celle de la magie de la pierre, de la ville sombre cachée derrière les apparences. Difficile d’en dire plus, car cette partie, qui reste encore assez mystérieuse à la fin du premier tome donne envie de vite s’y replonger, malgré, ou à cause, des ombres qui s’y profilent.
Et quand Nox se voit « offrir » la possibilité de passer de commis livreur à apprenti assassin, l’auteur convoque Robin Hobb, même s’il faudra encore un peu de poids aux mots et aux situations pour devancer l’autrice américaine.
Si le personnage de Nox est sympathique et très attachant, il est entouré de « seconds couteaux » qui donnent tout leur peps à cette aventure. Daphné, sa sœur, prend une place de plus en plus importante au fil du récit. C’est une image féminine à la fois forte en gueule et troublante. Il faut aussi compter avec son ami Symètre, dont le talent en étonnera plus d’un ou encore Aussilia, qui dessine comme on respire.
Le bruit de la ruche
Ce qui fait pour moi le sel de ce début de série est l’entrée d’éléments moins classiques dans le récit. Nox nous fait découvrir ce qu’il ressent après la découverte d’un poème qui pourrait expliquer en partie la ville et son propre passé.
La complexité de Gemina, ses mouvements, sa géographie, sa beauté, ses couleurs y compris le « sale et ensanglanté des combats », son autre côté, tout serait dans le rythme qu’elle transmet à qui veut bien l’entendre.
Et est-ce le hasard si Nox se retrouve avec ce poème intriguant ? Quel sera son destin une fois la ville percluse de blessures plus ou moins remise ? Quels seront les éléments qui relieront les protagonistes à la ville du Nord ? On attend de lire les suites avec impatience.