Poison bleu
Lorsqu’en 1975 George Alec Effinger et Gardner Dozois s’associent pour écrire Poison Bleu (Nightmare Blue en VO), ils ne sont encore que des espoirs de la science-fiction. Nés tous les deux en 1947, leur parcours sera par la suite bien différent. George Alec Effinger se concentrera longtemps sur la nouvelle (on en retrouvera une bonne quinzaine en France dans la revue Fiction entre 1975 et 1989, et une dans la revue Galaxies en juin 2001), ce qui lui vaudra un prix Locus en 1988, un Hugo en 1989, un Theodore Sturgeon et un Science Fiction Chronicle la même année. Côté roman, il s’est illustré avec la série du Privé Cablé (3 tomes dans la collection Présence du Futur de Denoël et un autre Science Fiction Chronicle). Une carrière honorable qui s’est malheureusement terminée en avril 2002, date de son decès.
Gardner Dozois s’est lui orienté assez rapidement vers l’édition après quelques coups d’éclats en tant qu’écrivain. Pour l’anecdote, sa première nouvelle écrite à l'âge de 17 ans fut publiée deux ans plus tard et nominée pour le prix Nebula (prix qu’il recevra pour une autre nouvelle en 1984). En charge des Best Science Fiction of the Year dès 1977 puis des Year’s Beast Science Fiction à partir de 1984, il gagnera vite ses galons d’anthologiste avec ces gros recueils réunissant chaque année le meilleurs de la SF outre atlantique . Non content de cette charge, il est également rédacteur en chef du célèbre Isaac Asimov’s SF depuis 18 ans. Une activité éditoriale qui lui a valu 13 prix Hugo en tant que meilleur éditeur depuis 1988, 15 Locus et 9 Science Fiction Chronicle ! Pluie de récompenses auxquelles il faut ajouter 13 prix Locus pour la meilleure anthologie de l’année. Avec autant d’activités dans le monde de l’édition, on comprend que Gardner Dozois n’ait pas vraiment le temps d’écrire. A part quelques nouvelles ici et là, il a toutefois publié un roman en 2000, L’étrangère, sortit chez nous dans feu la collection Présence du futur chez Denoèl.
Détective privé et extraterrestres…
La vie de Karl Jaeger est souvent dangereuse. Détective privé célèbre pour avoir résolu quelques affaires à priori insolubles, il passe son temps en filatures, cogitations et morceaux de bravoures pour bien faire son métier. Un quotidien plutôt mouvementé qui lui vaut les honneurs de la presse et qui conduit Schiller, un homme d’affaire richissime à lui confier une mission bien spéciale : Karl doit se rendre dans le territoire réservé aux extraterrestres Aensas (15 kilomètres carrés en Allemagne) pour rapporter des photos de leurs bases secrètes. Un monde mystérieux qui doit faire les gros titres des magazines détenus par le bussinesman. Sauf que tout ne se passe pas vraiment comme prévu. Arrivé dans le secteur, Karl est pris en chasse par les molosses des ET et parvient à en réchapper de justesse. C’est le début des ennuis. A son retour, un tueur tente de l’abattre… Bienvenue en 2068…
Plutôt agréable
Si Poison bleu est un roman étiqueté science-fiction, il est en fait à mi-chemin du policier. D’ailleurs, si on remplace les ET par des truands ordinaires, on peut tout à fait obtenir un honnête polar qui n’a plus rien de science fictif. Reste qu’ici les extraterrestres apportent une touche exotique et un peu plus. En prenant comme second personnage principal un ET d’une autre race (ce n’est pas un Aensa), Effinger et Dozois parviennent à le rendre attachant, lui donnant une histoire et un caractère propre, qui dépassent le simple attrait de son origine. Pour le reste, Poison bleu est un roman plutôt agréable, qui supporte deux trois défauts (on a du mal par exemple à bien percevoir que l’enjeu est la survie de la terre), deux trois longueurs et deux trois incohérences. Il convient toutefois de se souvenir qu’il s’agit d’une œuvre de jeunesse, pour Effinger comme pour Dozois et que l’ensemble n’est pas déplaisant. De plus il possède un univers futur et une approche des extraterrestres intéressants. Un bon roman d’été sans être inoubliable.