Nouvelle anthologie pour Librio de Barbara Sadoul après La Dimension fantastique, Les Cent ans de Dracula, Gare au garou !, Un Bouquet de fantômes et Fées, sorcières ou diablesses. Elle poursuit ici son exploration des grands thèmes du genre avec huit nouvelles consacrées à un thème ultra-classique et donc extrêmement risqué.
Le vampire, figure emblématique du fantastique
Comme son titre l’indique, l’axe de cette anthologie est le vampire face à sa solitude. Créature surnaturelle, machine à tuer, prédateur parfait, le vampire se voit pourchassé depuis qu’il existe par sa proie favorite. L’homme ne sera satisfait que lorsque le dernier représentant de cette race honnie se sera éteint. Le vampire est donc condamné à la solitude. Seul contre tous, face à sa condition d’immortel regrettant à jamais son humanité perdue, son âme est damnée et promise à d’éternels tourments.
Un casting alléchant : qualité et variété
On pourra rapprocher deux textes classiques que beaucoup connaissent déjà : La Voix du sang de Richard Matheson et L’Homme du second de Ray Bradbury (in Le Pays d’Octobre). En effet, par de nombreux aspects de leur œuvre, ces auteurs se ressemblent, ils ont en commun une écriture impeccable à mi-chemin entre SF et fantastique, un maîtrise de la narration et un style puissant capable de faire naître les ambiances les plus envoûtantes. Ici un enfant qui se découvre une soudaine passion pour Dracula : il a enfin trouvé sa voie, il veut être un vampire. Là, un autre garçon qui trouve le nouveau pensionnaire de sa grand-mère bien étrange, dormir le jour et sortir la nuit, c’est suspect, non ? Une bonne occasion de redécouvrir ces fameuses nouvelles.
Les autres bonnes surprises de ce recueils sont La Petite Fille qui mordait ses poupées de Gudule qui nous prouve une fois de plus son talent à dépeindre l’enfance dans cette short story réussie ; Pauvre Sonia de Claude Seignolle, une histoire d’amour impossible où une jeune vampire est prise pour une fille de petite vertu et Espèce en voie de disparition de Neil Straum qui commence par un conflit de générations entre jeunes et vieux vampires et se termine sur un joli clin d’œil à Je suis une Légende de Matheson.
Tanith Lee, pour sa part, livre une œuvre entre fantasy et fantastique. L’histoire d’une vampire qui tombe passionnément amoureuse d’un chevalier. Entre désir et devoir, les destinées s’entremêlent pour donner une belle histoire tragique. Fidèle à son style qui doit lui valoir autant d’admirateurs que de détracteurs, l’écriture de Chimère est ampoulée, « baroque et précieuse » pour reprendre plus gentiment André-François Ruaud (in Cartographie du merveilleux). Le lecteur n’échappera pas à quelques métaphores de supermarchés telles que « une épée de chair », certes c’est mieux que bistouquettes, zigounettes et autres sboubs mais ça reste très peu inventif au final. Un peu plus de sobriété dans le style aurait servi ce texte qui possède de grandes qualités par ailleurs.
Un bel effort dans l’originalité
Barbara Sadoul réussit son pari. Les huit nouvelles sont de bon niveau. Les situations sont souvent originales : une vampire confondue avec une péripatéticienne, un autre aux prise avec l’univers d’Hollywood… Bref, pour 2 euros, pourquoi bouder son plaisir ?