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Les Compagnons d'HeLa

Philippe Jozelon (Illustrateur de couverture), Manou Chintesco ( Auteur)
Aux éditions :   -  Collection : 
Date de parution : 30/09/04  -  Livre
ISBN : 2915653046
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Eric   - le 20/09/2018

Les Compagnons d'HeLa

Je n'arrive plus à me souvenir exactement depuis combien de temps je n'ai pas lu un roman vampirique qui n'ait été sensé révolutionner le genre. Longtemps en tout cas. Et le tout dernier en date est ce premier livre signé Manou Chintesco. Ancienne pubarde qui a longtemps traîné ses guêtres dans le milieu du rock, et d'ascendance roumaine de surcroît, ça aurait dû nous créer des affinités. Il n'en fût rien.

Début raté

Il faut dire qu'elle nous entraîne aux côtés de l'inoxydable Cagliostro, sur les traces du non moins insubmersible Comte de St Germain. Pour quelqu'un qui "n'a de cesse de moderniser le mythe du vampire" ça commence mal. Certes, pour assurer plus de grâce à son héros, Manou Chintesco a pris soin de relooker sérieusement le vieil alchimiste italien, qu'un tour de passe-passe a commodément transformé en chevelu body-buildé aux hormones de croissance (sosie de Peter Steele, le chanteur de Type O Negative, les connaisseurs apprécieront). Bref, ce dernier manage, de nuit uniquement, aussi surréaliste que cela puisse paraître, un groupe de laborieux bûcherons : Die First. Vampire certes, mais moderne en diable, il chasse via messageries Internet. C'est comme ça qu'il tombe par hasard, sur Lucio, inconséquent blondinet, croqueur de jugulaires lui aussi, et dont la troublante beauté fait soudain vaciller les fondements pourtant solidement transalpins de son hétérosexualité.

Cette rencontre va en quelques heures semer une pagaille irrémédiable dans la gentille routine de Cagliostro, mais surtout faire ressurgir un passé qu'il a mis presque deux cents ans à enfouir consciencieusement.

Vampires rockers qui ont le suçon débonnaire et la culpabilité réduite à sa plus simple expression, gothique de bazar et relent de vieille vengeance, l'ombre d'Anne Rice plane évidemment - omniprésente - sur ces Compagnons d'HeLa. Ce qui n'empêche en rien Manou Chintesco, qui connaît ses classiques, de lorgner quand le besoin s'en fait sentir du côté de Lewis et de son Moine, et vers la prose baroque de Lautréamont. Un peu de saphisme refoulé à la Le Fanu aurait joliment relevé la sauce. Dommage de ne pas y avoir pensé.

Un exercice périlleux

Se risquer à la littérature vampirique est toujours un exercice périlleux. Rarement genre n'aura véhiculé autant de clichés et de références, qu'il faut tout à la fois assumer mais dont il faut savoir à tout prix se démarquer. Sous peine de servilité. Manou Chintesco prétend avoir introduit une dimension psychanalytique dans le mythe, avançant même un parallèle qu'elle seule semble voir dans son œuvre, entre vampirisme/mortalité et inconscient/conscient. Une paternité contestable d'ailleurs, puisque la figure de Dracula a bien souvent inspiré les psychanalystes freudiens. Pardon dans ce cas de n'avoir vu dans Les Compagnons d'HeLa qu'une intrigue approximative servie par des ruses de feuilletonistes. Entre incohérences de récit, alibis douteux et style hésitant, pardon de n'y avoir pas vu autre chose qu'un rappel inassumé des classiques du genre.

Ça me navre de constater qu'hors Anne Rice, et il y a de cela presque trente ans maintenant, personne n'a vraiment fait briller quoique ce soit de neuf sous la pleine lune. Qui donc s'attaquera à bras le corps à une réelle réinterprétation du mythe du vampire ? Il faut dire que le défi est de taille. En tout cas, il est clair que de se réclamer d'ascendance roumaine n'aura pas suffi pour faire de Manou Chintesco une candidate sérieuse.

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