La Cité de l'éternel retour
Le scénariste Philippe Chapelle a déjà collaboré avec de grands auteurs (Bilal, Christin, Druillet, Mézières). Frédéric Marniquet est, lui, peu connu. Il a pourtant publié quelques albums chez Albin Michel qui ont la saveur de nos vieux Tintin ou Black et Mortimer comme Les Aventures de Scott & Hasting ou Les Aventures de Sean Mac Gregor (Albin Michel). Ils ont choisi avec ce one shot de suivre une nouvelle fois la trace des grands dessinateurs d’il y a quarante ans.
Une intrigue qui mêle passé et avenir
Un pilote français, vétéran de la Première Guerre Mondiale, héros de l’Aéropostale, se retrouve sans le sou en Amérique du Sud. Engagé par un couple de riches oisifs, il va devoir les piloter dans leur quête pour retrouver la trace du père de la jeune femme, disparu douze ans plus tôt dans la jungle amazonienne.
Bagarres, sabotage, attentat, atterrissage délicat, cité en ruines peuplée de fantômes venus du passé émaillent les pages de l’album et compliquent le recherche des disparus. Pris dans des événements étranges, coincés entre le passé et l’avenir, les héros vont essayer de comprendre et de survivre. Ballottés au gré des événements, ils vont se déchirer jusqu’à ce que peu à peu la vérité leur soit dévoilée.
Une belle ligne claire
L’album est dessiné dans le plus pur style des grands maîtres de l’école belge. On retrouve dans chaque dessin la patte d’Hergé et de Jacobs. Pour ceux qui l’ont connue, ces pages réveillent l’époque des héros aventuriers tels que Blake & Mortimer. Dès les premières cases, les avions en pleine guerre rappellent Le Secret de l’Espadon. Plus tard les sables du désert sont un écho du Crabe aux Pinces d’Or. Enfin la cité Inca est un reflet de celles déjà vue dans Tintin ou Bob Morane.
Deux auteurs en manque d’inspiration
S’inspirer des maîtres est parfaitement compréhensible pour des auteurs voulant se lancer. Utiliser les techniques graphiques ou les ressorts dramatiques trouvés dans les albums qui ont bercé notre enfance aussi. Si en plus le scénariste a trouvé un sujet qui, sans être vraiment novateur, offre une large palette de possibilités à son imagination, nous avons alors potentiellement un bel album.
Les auteurs de La Cité de l’éternel retour avaient tout cela. Mais ils n’ont pas su l’exploiter. Les dix pages (sur 64) qui servent à poser le personnage sont déjà longues, puisqu’elles n’offrent que peu d’intérêt dans le récit. Par la suite, la recherche de la cité est interminable, les auteurs utilisant toutes les ficelles pour ajouter des péripéties (et donc des cases). Ainsi, lorsque le lecteur arrive - enfin ! - au sujet réel de l’album, nous en sommes déjà à la moitié du livre ! La fin de l’histoire est du même acabit, bâclée ! Les héros après avoir été ballottés découvrent tout le mystère sans effort.
Les deux auteurs sont visiblement complètement passés à côté de leur album. Ils ne nous offrent que de beaux dessins où l’on retrouve le charme, un brin désuet, de la BD d’antan. Cet album ne séduira que les amateurs inconditionnels - et nostalgiques - de la ligne claire. Et encore, si vous aimez vraiment la bande dessinée de l’école belge, évitez cet ouvrage.