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1971-1981 - Les Jeux du Capricorne

Aux éditions :   -  Collection : 
Date de parution : 31/08/05  -  Livre
ISBN : 2290345865
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Eric   - le 20/09/2018

1971-1981 - Les Jeux du Capricorne

Et si par une drôle d'inversion des principes de l'anthologie, ce deuxième tome des Nouvelles Au Fil du Temps n'était pas la suite de ce recueil en quatuor tant attendue, mais bel et bien le deuxième volume de l'ultime roman de Robert Silverberg. Si ce diable d'auteur, féru d'expériences stylistiques, amoureux de la forme, ne nous livrait ici que sa plus personnelle et incroyablement ambitieuse production.

On aurait donc laissé, à la fin du Chemin de la Nuit un jeune auteur, incidemment nommé Robert Silverberg, au seuil d'une grande avancée créatrice. Tout au long des pages de ce premier on l'aurait vu grandir, arriver à maturation, prendre de l'assurance. Et toujours selon le même principe, qui consisterait à illustrer les états d'âme de son protagoniste d'auteur par les nouvelles qu'il produirait, Les Jeux du Capricorne, s'ouvrirait sur un écrivain maître de sa technique, et parfaitement conscient de son talent.

Un monde ébranlé...

Nous sommes alors en 1971. Le monde est ébranlé par les révolutions, les Etats-Unis s'embourbent à 10 000 km de chez eux dans une jungle qu'on dit infestée de ces communistes qui envoûtent tous les campus de la planète. C'est l'âge des grands martyrs libérateurs, des Lumumba, des Guevara, des Malcolm X. Les Flower Childrens ont affûté les guitares et harmonisent la contestation. La marge devient la norme, et les esprits se colorent de brumes acidulées, résidus de la recherche militaire. C'est une époque riche pour un écrivain qui se nourrit du réel. Et notre jeune auteur va plonger à corps perdu dans cette agitation. Et de fait les nouvelles présentées ici font montre de cette ébullition. Beaucoup de récits ont une forme narrative très élaborée : savamment décousue, croisée, à narrateurs multiples. Parfois même la forme en vient à primer sur le fond. On perçoit toute la minutie du travail de mise en place, et d'ailleurs le jeune écrivain ne manque pas de s'en plaindre, de dire même parfois combien est devenu douloureux pour lui le processus de création. Cela ne manque pas de nous étonner, car le jeune écrivain dont nous avions fait la connaissance au long du premier tome se targuait alors d'être capable d'écrire jusqu'à trois nouvelles par semaine. On sent donc les aspirations du personnage tendre vers quelque chose que la SF ne sera plus à même de lui apporter, et en 1974, Robert Silverberg jettera l'éponge et annoncera officiellement qu'il prend sa retraite.

L'homme transformé


Bien courte retraite, puisqu'il reviendra aux affaires en 1979, mais changé encore une fois. Rasséréné, plus désireux de s'amuser, moins outrancier dans ses expériences stylistiques. Un autre écrivain, un homme mûr, prêt à en découdre avec de larges succès populaires et qui n'a plus rien à prouver, seulement des défis à relever pour la beauté du jeu.

Peut-être au fond qu'il n'est pas si absurde d'imaginer que "cette manière d'autobiographie", aurait aussi pu être une manière de roman. Je trouve l'idée assez belle, et pas seulement parce que c'est moi qu'il l'ait eue en l'occurrence. Toujours est-il que le présent volume, s'il offre toujours une belle moisson de nouvelles, ne nous offre qu'un seul inédit, pour une forte proportion de rééditions, parfois récentes et puisque sorties des antho d'Omnibus, parfois plus rares, et datant d'une vingtaine d'années. Dans tous les cas la traduction en a été revue pour l'occasion. On saluera donc cette fois encore la rigueur du travail effectué, et on répétera à quel point ce projet monumental, puisqu'il s'étendra sur quatre volumes, en fait quelque chose de rare et de précieux. Laissez vous donc guider au fil du temps de ces nouvelles, c'est un beau, un très beau voyage dont il ne faut en aucun cas faire l'économie.

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