Christian
- le 31/10/2017
La Sirène gourmande
Les Editions Dupuis et Denis Lapière ont lancé en 2007 la collection des Pucerons. Quatre séries ont déjà été publiées. Deux d'entre elles en sont déjà à leur deuxième album (Hugo et Petit Poilu). Le concept est intéressant. Pas de texte. Une succession de dessins à regarder comme une vraie lecture, car ils s’organisent suivant le sens de lecture traditionnel et suivant un récit cohérent déroulé sur une trentaine de planches. Chaque case est un mot et chaque page est une phrase. L’enfant (de 3 à 5 ans) est autonome dans sa lecture et le dialogue avec le parent sur l’album est censé se tenir a posteriori. Rien n’empêche tout de fois de « commenter » l’histoire à votre enfant ou de laisser l’enfant vous raconter l’histoire.
Ce premier album de Petit Poilu, paru en janvier, est issu de la collaboration entre Pierre Bailly et son amie Céline Fraipont qui l’ont testé sur leur fille. L’album a été initié avant que la collection Pucerons ne soit créée par le scénariste, Denis Lapière, collaborateur de Pierre Bailly sur la série Agadamgorodok (collection Romans Graphiques). Le dessinateur a également publié six albums de la série Ludo, bientôt rééditée. Le septième paraîtra dans la collection Punaise qui s’adresse à un public (6 à 8 ans) moins jeune que les Pucerons.
Cet album est une première de par son public cible et sa facture narrative. Idée remarquable et concept marketing au poil. Il fera de nombreux émules, car il a déjà beaucoup plu.
Sécher l’école
Petit Poilu se réveille en sursaut, prend son petit déjeuner, dit au revoir à sa maman et part à l'école. Tout serait simple si, en chemin, une pluie diluvienne et des flaques gonflées à bloc ne le précipitaient dans un océan et s’il ne se faisait avaler par une sirène qui mange tout sur son passage.
Prisonnier de son énorme estomac, Petit Poilu pourra s’échapper en jouant à la luge avec un ver jaune. Il atterrira sur le pont d’un bateau et fera la connaissance d’une pieuvre verte. Tant pis pour l’école. Tant pis s’il est trempé. L’important, c’est de retrouver son petit lit douillet…
Petits (Poi)lecteurs
Petit Poilu permet aux enfants de lire avant de savoir lire. C’est une excellente entrée en matière pour aborder la bande dessinée, mais aussi la lecture générale. C’est aussi une invitation à s’exprimer et une occasion d’échange avec les parents.
Sur le fond, l’histoire traite d’une angoisse (être dévoré) qui n’est pas sans rappeler celle de Jonas et du petit chaperon rouge. Mais cette anxiété primale est rapidement surmontée grâce aux situations comiques et ludiques dans lesquelles Petit Poilu est plongé (ou se plonge lui-même). Le rythme est soutenu et c’est toujours inattendu ou drôle.
Sur la forme, les traits sont apurés au maximum. Les couleurs sont vives et changeantes. Les expressions des visages et des corps sont comiques et réussies. Pierre Bailly dit consacrer beaucoup plus de temps à la réalisation de ces dessins aux formes simples que ceux, plus réalistes, de ses albums pour adultes.
N’hésitez pas à faire un test avec vos enfants. Les plus jeunes adorent Petit Poilu. Ils frémissent quand il se fait engloutir par la sirène, mais ils suivent ses mouvements, ses mimiques. Ils s’identifient à lui. Ils accompagnent la lecture de leurs propres commentaires. Ils inventent un texte et jouent à lire à haute voix pour impressionner leurs parents ou leurs frères et sœurs. Ils ont leur BD désormais. Petit Poilu ? Petit. Mais lu.