La Dame des MacEnnen

Médecin et psychologue de son état, Armand Cabasson s'est engagé dans deux voies en littérature. La première, c'est le polar historique dans des ambiances napoléoniennes de préférence comme Les Proies de l'officier. La deuxième, c'est la nouvelle fantastique avec de superbes recueils que l'on a déjà salués sur Actusf comme Loin à l'intérieur ou Le Poisson bleu nuit. La Dame des MacEnnen est donc son premier (court) roman en fantasy. Une première aux éditions Glyphe.

Enneline, une Ange – presque – déchue

Dans la grande guerre céleste qui opposa les révoltés de Satan aux troupes loyales de Dieu, Enneline eu le tort de rester neutre. Une position qui lui vaudra une sanction particulière à la fin de la bataille. Sans être complètement rejetée avec les fidèles de Satan, elle sera envoyée en exil sur Terre, enfermée dans un petit lac au cœur de ce qui deviendra l'Écosse. Une éternité d'ennui plus tard, l'apparition des hommes lui permettra de devenir leur déesse protectrice et d'animer un peu son existence. Elle deviendra même la maîtresse du seigneur des MacEnnen, prenant part à la guerre civile anglaise des Roses au XV^ème siècle.

Simple et rudement efficace

La Dame des MacEnnen est un court roman qui a le mérite de l'efficacité. Sans longueurs inutiles, avec une seule narratrice, Armand Cabasson nous entraîne dans une histoire passionnante autour de cette ange en exil. Il a su faire de son héroïne un être à part, tout à la fois portant sur le monde un regard divin mais s'y attachant avec des sentiments profondément humains. Ses troubles n'en sont que plus touchants et son histoire n'en est que plus forte. Le résultat est un récit qui a pour lui un contexte historique formidable (dans ce domaine, Armand Cabasson s'y connaît particulièrement bien et la Guerre des Roses est un terreau fertile avec ses multiples batailles et retournements de situations en quelques années) et qui a aussi le goût salé de la tragédie. L'amour d'Enneline et d'Ingram, le seigneur des McEnnen, est d'autant plus beau qu'il ne peut avoir qu'une issue dramatique, avec en prime des moments particulièrement forts. Et surtout, tout cela sans aucune mièvrerie, Armand Cabasson maîtrisant parfaitement son récit.

La Dame des MacEnnen est l'exemple parfait d'une fantasy intelligente. Sur une base redoutablement bien documentée (d'ailleurs l'auteur a eu la bonne idée d'ajouter quelques pages à la fin du texte sur la Guerre des Roses afin de bien décrire le contexte historique), il a tissé une histoire mélangeant magie, divinité, rapport entre une ange et les humains, moments héroïques, réflexion sur le destin et influence de chacun sur le cours des choses. C'est assez remarquable pour un texte de seulement 140 pages. On le savait déjà excellent dans la forme courte. On le découvre très bon dans le domaine de la novella. C'est la confirmation que cet auteur a du talent. Beaucoup. Et qu'il n'a sans doute pas fini de nous épater.