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Le Miroir de Cassandre

Bernard Werber ( Auteur), Robert Daly (Illustrateur de couverture)
Aux éditions : 
Date de parution : 30/09/09  -  Livre
ISBN : 9782226194022
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marie   - le 31/10/2017

Le Miroir de Cassandre

Un auteur controversé.

Bernard Werber est de ces auteurs qu'on ne présente plus. Encensé, voir porté aux nues par ses fans (parfois jusqu'au fanatisme), il est aussi généralement attaqué par les critiques littéraires en tout genre, voire même crucifié au nom de l'Art et la Littérature. Est-il besoin de préciser que les « pro Werber » et les « anti Werber » se livrent une lutte sans merci, chacun tentant de prouver à l'autre qu'il a raison ?
Et si nous essayions de considérer Le miroir de Cassandre d'un oeil qui se veut dénué de tout a priori, afin de pouvoir de juger sur pièce et non sur l'homme ?

Une idée première originale, une quête intéressante.

Bernard Werber nous livre une nouvelle fois un roman sur une base mythologique. En effet, l'héroïne se prénomme  Cassandre, comme la belle jeune femme maudite par Apollon. Ayant reçu de lui le don de voir l'avenir durant son enfance, elle fut condamnée par la suite à ne jamais être crue par ses pairs, pour s'être refusée au désir du dieu. 

La jeune Cassandre du roman, vit quant à elle dans une sorte d'insitution-orphelinat pour jeunes filles. Ses parents sont morts et rien ne semble l'attendre à l'extérieur. Mais lorsqu'une personne lui envoie une montre capable de mesurer en temps réel les probabilités de mourir de son porteur, tout va basculer... À la recherche de sa propre histoire, résolue à lever le voile sur les  treize premières années de sa vie dont elle ne conserve aucun souvenir, Cassandre s'enfuit. Son périple la mènera au cœur d'une société secrète, fondée par des personnages tout aussi étranges. Vivants tranquillement cachés au fond d'une décharge, les clochards Duchesse, Baron, Vicomte et Marquis ont instauré une république au sein même de la République.

On recense ainsi plusieurs thèmes chers à Bernard Werber : l'initiation et la quête de soi, la société créée par des individus que rien ne prédestine à s'associer, la mythologie, l'importance des rêves, l'écologie... Retrouvant dans ce roman la trame et les ficelles propres à l'univers de l'auteur, on peut remarquer que le nouvel angle qu'il utilise est assez intriguant. L'exclusion de la société de certains individus via le phénomène de clochardisation et le rejet qui s'ensuit sont un peu « romancés » mais intéressants à aborder. De même l'idée de la montre à probabilités ne manque pas de piquant et entraîne des situations paradoxales.

Un livre déconcertant.

Malgré un début assez intéressant, il est surprenant de constater que le livre devient peu à peu ennuyeux et qu'il est possible de perdre le fil de la narration.
Par moments, l'intrigue tournée sur l'introspection de la jeune femme manque d'action et casse le rythme de l'ouvrage.
D'autre part, il n'est pas aisé de s'attacher aux différents personnages, assez caricaturaux (l'ancienne actrice défraîchie  jalouse de la jeune femme, le clochard bourru au grand coeur, le jeune asiatique féru d'informatique)...

Mais là n'est pas le plus embarrassant.
L'histoire paraît de moins en moins crédible au fur et à mesure de son déroulement. C'est assez déroutant, lorsque vous vous laissez porter par un récit et que vous stoppez brutalement votre lecture
parce qu'à cet instant vous vous dites : « Non, ce n'est pas possible ».
En effet, on peut emmener un lecteur à croire aux histoires les plus extraordinaires (un monde peuplé par des nains, des hobbits, des elfes, des orques, etc, les extraterrestres qui viennent attaquer la Terre, l'Apocalypse et ce qu'il s'ensuit, les morts qui ressuscitent avant de rajeunir, et tutti quanti).
Mais le monde, ses habitants, ses coutumes (etc) doivent nous paraître logiques et cohérents, même si leur sens nous en semble obscur au premier abord.
L'univers du Miroir de Cassandre, est très proche du nôtre (une analogie dans une réalité parallèle, le nôtre dans quelques années) ? Et c'est cette proximité qui peut nous amener à douter de la crédibilité de l'intrigue.Il est difficile de croire, par exemple, en un Ministère du futur; que des crédits publics puissent être alloués en un ministère chargé de faire des prédictions. Compliqué d'adhérer à une vision dans ces conditions, lorsque les nouveaux éléments du récit paraissent peu vraisemblables.


Et à ce propos dans Le miroir de Cassandre use et abuse du bon vieux deux ex machina. Ainsi, par exemple lorsque l'héroïne à deux doigts d'y passer,  se (re)découvre des talents cachés qui la sauvent miraculeusement, ou ce personnage (par ailleurs sorti de l'intrigue depuis une certain nombre de chapitres) qui  retourne très opportunément sa veste, en disant en substance « j'ai compris que vous aviez raison ».
 La palme aux trente ou cinquante dernières pages où la désagréable impression qu'on essaie de nous faire prendre des vessies pour des lanternes est plus que persistante.

Enfin, la propension à l'autopromotion et au recyclage de Bernard Werber, fini par avoir raison de notre bonne volonté. On y retrouve trop de vieilles idées, déjà traitées dans d'autres romans. On pourrait y voir une volonté d'unifier son œuvre, mais on ne peut pas s'empêcher d'y voir, au mieux, une suite de clins d'œil lourdauds.

Une fois encore, Werber bâcle ses thématiques. Ici, l'introspection, ou comment aider les autres sans s'aider soi-même au préalable ? Un message qu'il assène avec trop de candeur, puisque dès que l'héroïne accepte cet état de fait, plus ou moins consciemment, tout s'arrange comme par miracle, pour déboucher sur un magnifique happy end, plutôt en décalage avec le reste de l'histoire, assez pessimiste.

En résumé: une histoire à laquelle il est difficile de croire, dans laquelle évoluent des personnages caricaturaux… Et un auteur qui fait ostensiblement référence à ses autres livres.
Les moins exigeants des fans de Bernard Werber y trouveront peut-être leur compte. Pour les autres, rien n'est moins sûr.

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