Là où les enfants ne s'aventurent pas

Raul Arnaiz est espagnol. Après de nombreuses années à travailler pour des studios d'animation, il s'est intéressé à la bande dessinée. Après Retrouvailles  (Home volume 1) qu'il a co-scénarisé avec Oscar Herrero et dessiné seul, il publie le premier tome d'une série dont il est le seul auteur : Légendes de Parva Terra.

Sales gosses !

Dans le passé, les Adultes régnaient sur le monde. Mais ils ont complètement disparu. Les Enfants se réveillèrent un matin, ayant tout oublié de leur vie précédente. Ils reconstituèrent une société, regroupés en trois tribus. Les Chevaliers, blonds, font régner l'ordre avec leurs épées depuis leur château fort. Les pirates roux utilisent leur agilité et leur navire pour voler les chevaliers et les sorciers aux cheveux noirs vivent à part, se servant de leur savoir pour repousser les assauts et garder leur indépendance.

Roméo est le Roi des chevaliers et veut contrôler tous les Enfants. Il est décidé à faire la guerre totale aux autres, grâce à sa nouvelle et terrible arme secrète. Son meilleur ami Leo, lui, est perturbé. Les Parents semblent lui envoyer des rêves, lui rappeler l'ancien temps et le prévenir de terribles moments à venir. Poussé à la fuite par le Roi, Leo entame une quête, celle de l'histoire de son peuple et peut-être celle qui ouvrira les portes de l'avenir. Mais les ombres rôdent...

Intelligent et vivant

Tout d'abord, ce qui frappe le lecteur est le parti-pris du dessinateur. Les dessins sont simples, directs, mais efficaces. Utilisant les techniques développées pour les mangas afin de donner de l'énergie à ses pages, Arnaiz appuie encore un peu plus son trait de couleurs vives et éclatantes, rouges, jaunes et bleus puissants qui donnent un aspect jeune, presque enfantin à l'album.

Le message de l'auteur, lui, est plus subtilement caché dans les dialogues et les expressions des personnages. Derrière le masque des enfants, c'est toute notre société et ses travers qui se trouvent critiqués. Soif de pouvoir et ambition, racisme, exclusion et peur de l'inconnu se dévoilent peu à peu, dessinant une toile de fond sombre pour des images gaies et colorées.

Plus que cela, cette question sous-jacente, qui sort peu à peu des pages : sans s'appuyer sur le passé, comment peut-on construire un avenir ? Les personnages de Arnaiz sont bloqués, figés dans un infini présent qui semble ne jamais avancer. L'impulsion donnée par le héros, son questionnement, agit comme une clé ouvrant la porte à une évolution possible. Un changement qui viendra aussi de la collaboration de tous, dont les ombres, qui cherchent le pouvoir, veulent tuer l'émergence.

Cette série promet beaucoup et s'adresse même aux plus jeunes.