La Naine aux ectoplasmes

Passionné d’histoire (il détient un DEA dans cette discipline), Thierry Gloris est le scénariste de plusieurs séries historiques comme Le Codex Angélique et Waterloo 1911 chez Delcourt, et Malgré nous chez Quadrants.

Après avoir été dessinateur pigiste pour d’importantes agences de pub et maisons d’éditions, ainsi que pour des magazines humoristiques, le dessinateur québécois Jacques Lamontagne s’est lancé dans la BD en 2004 avec Les Druides chez Soleil.

Spectres, nains et fins limiers

Dans le Paris du XIX ^ème siècle, Kathy Wuthering, célèbre médium affligée de nanisme, disparaît mystérieusement. Elle ne laisse derrière elle que deux globes oculaires, qui laissent croire à son assassinat malgré l’absence de corps. Dépassé par ce mystère, le policier en charge de l’enquête se tourne vers Auguste Dupin, détective privé spécialisé dans les affaires étranges. Tandis qu’il mène l’enquête, Flora, sa jeune stagiaire, se lance elle aussi dans des investigations pleines de mystère à la demande d’un jeune homme de fort petite taille…

Un langage truculent

Avec des dialogues hauts en couleurs, le langage des personnages d’ Aspic, Détectives de l’étrange, mélange de tournures actuelles et d’expressions plus anciennes, séduit par sa vitalité. Entre les citations latines dont le fin limier Auguste Dupin truffe sa conversation, le sabir franco-anglais de Kathy Wuthering et les saillies piquantes empreintes de féminisme de la jeune Flora, le lecteur se retrouve entraîné tout aussi bien par les aventures trépidantes des détectives que par leur langage fleuri. Tout l’humour des situations se voit renforcé par ce langage truculent qui, loin de paraître vieillot, mêle avec une grande habileté palabres d’hier et d’aujourd’hui.

Des personnages au caractère bien affirmé

Servis par un dessin efficace qui renforce l’humour et le dynamisme des situations, l’intrigue et les personnages sont bien campés. Si le caractère affirmé et l’audace de Flora peuvent paraître anachroniques pour une femme du XIX ^ème, ses actions téméraires et son caractère volcanique font progresser l’action à toute vitesse. Face à ce personnage féminin énergique et bien trempé, Auguste Dupin, détective plein de flegme et Hugo Beyle, jeune homme de petite taille au passé mystérieux, ne sont pas en reste. Le détective, vieux renard imperturbable, mène ses investigations avec méthode et rigueur, la réplique fracassante toujours suspendue aux lèvres. Hugo Beyle, quant à lui, étrange petit bonhomme qui se retrouve catapulté client et assistant de Flora, dévoile peu à peu ses secrets parallèlement à l’enquête de la jeune fille…

Dynamisme et humour décapant

Dès les premières pages de La Naine aux ectoplasmes, où une Kathy Wuthering inquiète invoque un esprit pour lui prédire son avenir, le récit louche du côté du fantastique. Mais l’essentiel de l’intrigue consiste en investigations diverses menées par Dupin et Flora chacun de leur côté. Ce qui prédomine cependant c’est un humour omniprésent, renforcé par les dialogues. L’association forcée de Flora et Hugo y joue un rôle essentiel. Pleine d’énergie, la jeune fille entraîne son malheureux client dans de folles équipées qui donnent au récit un très grand dynamisme.

Tous ces ingrédients concourent à faire de ce premier tome d’ Aspic, Détectives de l’étrange, un excellent récit à la manière des feuilletons de détectives à l’ancienne et un premier opus alléchant.