Sentinelles

Sentinelles

Scénariste et dessinateur, Eric Stalner est l’auteur de plusieurs séries historiques, comme Le Boche ou Le Fer et le Feu, en collaboration avec son frère Jean-Marc Stalner, puis Flor de Luna avec Pierre Boisserie. Dans le domaine du fantastique, il a réalisé en solo Le Roman de Malemort et la saga de science fiction Voyageur avec Pierre Boisserie.

En 2019, une catastrophe empoisonne la terre et cause la disparition de 95% de la population britannique. Presque 50 ans plus tard, en 2067, une petite communauté subsiste dans un territoire épargné, en rejetant le savoir du passé. Seul parmi eux à avoir un jour parcouru les zones contaminées, Lawrence vit à l’écart du village, entouré de ses livres. Malgré l’hostilité des villageois, il tente d’enseigner la lecture à la jeune Keira.
Mais celle-ci s’enfuit un jour avec deux garçons en lui volant une carte des passages menant à Londres, inconsciente des dangers qui la guettent sur ces sentiers empoisonnés. Sans attendre la vindicte des villageois qui le jugent responsable de la disparition de la jeune fille, Lawrence s’élance à sa poursuite sur les routes périlleuses peuplées de mutants sanguinaires…

Un récit post-apocalytique d’une grande richesse thématique

Pour sa première incursion en solo dans le domaine de la science fiction, Eric Stalner s’attaque au récit post-apocalyptique avec une certaine maîtrise. Dans Sentinelles, à travers le périple de son héros, il s’attache à explorer des thèmes classiques du genre, comme les débordements de la science, la grande ville dévastée et livrée à la violence, et les mutations de certains êtres humains…
Il inscrit également en toile de fond des préoccupations plus récentes sur l’écologie et l’influence de l’homme sur l’environnement, thèmes d’une absolue actualité par les temps qui courent. Il évoque ainsi la disparition des abeilles, un sujet que l’on peut régulièrement voir revenir aux informations. D’ailleurs, dès le départ, Eric Stalner pose son histoire comme un futur possible où l’environnement serait contaminé par une pollution invisible.
Il vient s’y greffer la menace d’un extérieur technologiquement plus avancé et hostile, à travers une société privée qui a racheté la Grande-Bretagne et qui cherche à en exploiter les ressources, fussent-elles humaines. Cela montre dans Sentinelles une considération certaine pour une question qui nous intéresse tous : la mainmise des intérêts privés sur un pays et la nature.

Le savoir, un fléau… ou la seule porte vers l’avenir ?

L’un des aspects les plus intéressants de Sentinelles est sa réflexion sur la place du savoir chez les hommes. En effet, la petite communauté isolée à laquelle appartiennent Lawrence et Keira rejette la connaissance, qu’elle considère source de tous les maux qui se sont abattus sur le monde, allant même jusqu’à refuser l'apprentissage de la lecture.
Lawrence, lui, conçoit  les choses très différemment. Il pense que le savoir est le dernier rempart face à la barbarie des grandes villes et l’obscurantisme religieux qu’il voit s’instaurer dans le village. C'est selon lui le seul espoir de reconstruire un avenir. Une vision qui se matérialise à Edimbourg avec la grande bibliothèque, seul havre de paix au cœur de la violence.
Mais les gens de l’extérieur laisseront-ils aux habitants de la Grande-Bretagne cette possibilité ? À voir dans le tome 2…

Pour résumer, la richesse de sa thématique et son récit bien rythmé et bien construit font de Sentinelles une lecture, certes sans grandes surprises, mais fort agréable. Un futur classique, en somme…