Un Royaume amnésique et perturbé
Mais la fillette grandit et souhaite de plus en plus s'évader du rôle dans lequel l'enferme son entourage. Elle fait donc le mur et part à la rencontre de sa capitale, de ses rues sombres et des habitants aux habitudes nocturnes. C'est là qu'elle rencontre les premiers vrais humains, des personnes qui pensent, souffrent et ont réellement des sentiments autonomes.
Peu à peu, elle prend conscience du mensonge amnésique dans lequel elle vit, des blessures anciennes qui n'ont jamais cicatrisé et de l'horreur qu'avait répandue son père.
Vérité, mensonge, faux semblants et vraies douleurs s'entremêlent tandis que, aidée de ses amis, Bitterblue va tenter de se comporter en reine, celle qui veille sur son peuple.
De la fantasy humaine
Kristin Cashore n'a pas toujours réussi ses romans. Graceling augurait d'une série éblouissante tandis que Rouge s'embourbait dans des pages sans intérêt. Bitterblue ramène ce cycle au niveau de ses débuts, nous offrant une vision aussi intéressante que surprenante de la fantasy.
Est-ce le fait que l'auteure soit une femme ? En tout cas, ce livre est très loin des aventures de guerriers forts à l'épée et fleurant la testostérone. Les héros doutent, se trompent, pleurent et souffrent. Aucun n'est un surhomme, même les "gracelings", ces hommes et ces femmes dotés de pouvoirs. Ils aiment et se donnent, se haïssent ou souffrent de psychose, mais toujours à l'échelle de ce qu'ils sont : des humains.
Certes, il n'y a pas ici le souffle épique de Graceling, un peu lent et long par moment, mais cette histoire de mémoire occultée, de fracture de l'esprit à l'échelle de tout un pays est forte, prenante. Destinée à un public plus large que celui de la fantasy habituelle, cette série détonne et montre qu'il est encore possible d'innover en écrivant de la fantasy.