La République des Voleurs

Après leur fuite et surtout la réussite du casse du siècle, nos deux compères ne sont pas au bout de leurs peines.

Locke empoisonné par un vieil ennemi n'en a plus pour très longtemps à vivre car aucun médecin ou même alchimiste ne peut le soigner. Jean ne sait plus quoi faire quand un étrange Mage-Esclave va proposer un marché aux deux larrons. La magie peut soigner Locke, elle peut le purger du mal qui coule en lui et le tue à petits feux. Maintenant, il va devoir accepter de s'allier avec ses ennemis d'hier les Mages-Esclaves et encore il ne survivra peut-être pas à l'épreuve. Le procédé est tellement douloureux qu'il sera aux portes de vouloir mourir plutôt que guérir...

Locke est à deux doigts de refuser l'aide mais lorsque le Mage-Esclave cite le nom de Sabetha, le passé remonte à la surface ainsi que son amour éconduit par la belle et dangereuse voleuse.

Encore jeune à l'époque, apprenti voleur, il arpentait les rues et apprenez le dur métier de la cambriole. Quand il a rencontré la jeune Sabetha, amour de sa vie, c'est sûrement la seule qui rivalise avec lui en compétences et duperies.

Entendre son nom finit de convaincre Locke d'accepter le marché et le voilà dans un imbroglio politique qui va l’emmener bien loin de ses activités habituelles. Entre le jeu d'une élection, des adversaires sans aucune morale et le choix d'aimer ou haïr, Locke aura forte à faire pour sauver sa peau une fois de plus.

Que du bon !

Pour commencer il faut reconnaître que la couverture de ce troisième opus est vraiment magnifique. Elle présente cette suite tant attendue avec comme toile de fond les toits d'une ville où l'on voit deux personnages en costume et masqués comme des comédiens de la Commdia dell'arte . Mystères, danger au crépuscule, tout l'univers des Salauds Gentilshommes. Une belle invitation au voyage pour lequel, vous ne serez pas déçu.

Bien voici donc le troisième tome d'une série que j'affectionne particulièrement. L'univers y est riche, dense et d'une grande complexité. Des personnages travaillés avec une psychologie assez originale. Locke et son ami et bras droit Jean en sont de parfaits exemples. On les retrouve en fâcheuse posture malgré le coup du siècle qu'ils ont réussi dans les précédents volumes. Ainsi le talentueux voleur qu'est Locke se retrouve mêlé à une lutte dont il se serait bien passé. Mais voilà sa survie dépendait de son choix et surtout de l'acceptation de suivre les Mages-Esclaves dans une élection qui sent le soufre.

L'auteur ne va s'arrêter en si bon chemin, il va enfin nous faire connaître la très belle et dangereuse Sabetha. Grand amour de Locke, ce fantôme du passé est sûrement la seule femme ou même homme à rivaliser avec le héros en habileté et intelligence. Ce qui va nous donner non pas une mais deux intrigues, tout au long du roman. En effet Scott Linch va jouer sur deux tableaux : le présent avec un jeu de dupes politique auquel plusieurs factions participent et notamment Sabetha et le passé par la même Sabetha au cours de nombreux  flash-back permettant de nous faire retrouver de chers disparus. Les différents amis perdus, ceux qui sont tombés dans les derniers volumes reviennent donc pour notre plus grand plaisir.
Dans cette deuxième intrigue nous apprenons un peu plus sur Locke et sa rivale. Leurs relations amoureuses, leur rupture.

Il va devoir tout au long de l'histoire se poser la question d'affronter ou bien séduire cette adversaire qui rivalise avec lui en tromperie et ingéniosité. C'est une belle spirale de joute où le charme et la volonté sont les armes de ses deux personnages hors du commun. Ils vont prendre un peu plus de profondeur et évoluer au fil des pages.

C'est vrai que vous ne retrouverez pas le montage d'un casse ou les plans géniaux pour une arnaque mais plus une lutte intestine faîte par deux fines lames de la comédie et des sentiments.
J'ai beaucoup apprécié l'approche de l'auteur pour ce nouvel épisode qui mélange à souhait les coups bas et autres manipulations de ses héros pour faire pencher la balance des élections de la cité des Mages. Avec une plume rapide, très descriptive, qui permet de s'immerger très facilement dans cet univers extrêmement riche. Les coutumes, goûts et mœurs de chaque ville « visitée » par les romans sont autant de sources pour une originalité jamais démentie, bien au contraire. On apprend beaucoup de choses sur cette très secrète caste de Mages-Esclaves, leurs motivations et visées, ce qui donne un peu plus d'intérêt encore à l'histoire.

Enfin, les dialogues sont une fois de plus au rendez-vous, beaucoup d'humour, de gouaille des bas quartiers qui donne un rythme enlevé à l'ensemble. Scott Linch a vraiment le don pour poser son décor et emporter le lecteur dans son univers soigné et parfaitement cohérent. Le seul petit bémol que je donnerai serait que ce tome prépare l'arrivée prochaine du quatrième volume et donc moins tourné vers l'action et l'arnaque que l'on avait l'habitude de trouver avec Locke. Mais c'est là, un moindre défaut au vu de la qualité du récit.

Vivement la traduction des prochains opus de cette série fleuve, de la très grande fantasy.