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Thumbprint

Joe Hill (Scénariste), Jason Ciaramella (Scénariste), Vic Malhotra (Dessinateur)
Aux éditions : 
Date de parution : 15/10/14  -  BD
ISBN : 9782809442137
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Bastien   - le 31/10/2017

Thumbprint

Vous connaissez sûrement Joe Hill. Fils de Stephen King, il prend rapidement son envol sous un pseudonyme, et se fait remarquer pour des nouvelles et des romans, souvent teintés d’horreur et de fantastique. Plusieurs fois récompensé, son travail est toujours très intense et efficace. Son second roman, Cornes, est adapté au cinéma par Alexandre Aja. Du côté des comics, il est franchement révélé au public pour son approche scénaristique dans Locke & Key, série pour laquelle il recevra plusieurs récompenses. Thumbprint est une adaptation comics de sa nouvelle intitulée à l’identique.

Dans l’aventure scénaristique de Thumbprint, Joe Hill est épaulé par Jason Ciaramella, connu pour avoir notamment signé Godzilla : Kingdom of Monsters. Ce n’est pas sa première association avec Joe Hill. Précédemment, ils ont scénarisé Kodiak (que l’on retrouve dans cet album), The Cape, et The Cape 1969.

Au dessin on retrouve le canadien Vic Malhotra qui se fait connaître durant l’année 2011 grâce à un épisode de la série Murder Book. Il est actuellement illustrateur pour plusieurs courtes séries.

Retour d’Abou Ghraib.

Souvenez-vous : entre 2003 et 2004, le scandale éclate. Accompagnées de photographies et de vidéos, les informations internationales signalent que les soldats américains basés en Irak ont torturé les prisonniers irakiens. L’opinion publique est choquée, les militaires américains identifiés sont très sévèrement punis, et la vision de l’armée américaine par le peuple est très largement ébranlée.

Mallory Grennan est une jeune soldate américaine qui vient de rentrer d’Abou Ghraib. Par chance pour elle, ce n’est pas les pieds devant, ni avec la honte publique d’avoir participé à ces horreurs. Mais c’est uniquement par chance : quelques centimètres de plus vers le haut, et la photographie d’une botte sur la tête d’un prisonnier nu au sol montrait le visage de Mallory.

A peine rentrée sur le sol américain, quelques heures après le décès de son père, elle ressent déjà la honte et la difficulté de se réinsérer. Travaillant dans un bar miteux où les piliers de bar sont sa seule compagnie, et où son collègue de travail n’est qu’un pervers qui ne cherche qu’à tromper sa femme, elle ressasse le passé intérieurement, et ne peut s’empêcher de repenser au rôle qu’elle a joué dans ces faits.

Mais un soir, en rentrant chez elle, elle découvre une lettre qui lui est adressée : contenant en tout et pour tout une simple empreinte digitale, le doute l’assaille, et la peur ressurgit. Et si quelqu’un savait ?

Poignant.

En préambule, il faut savoir que c’est une courte histoire qui nous est présentée : une soixantaine de pages pour illustrer la courte nouvelle de Joe Hill. C’est un format peu commun pour un comics, mais pour compenser nous avons en prime le texte original de la nouvelle de l'auteur sur le sujet, ainsi que le premier comics de Joe Hill et Ciaramella : Kodiak. Au final, l’objet reste dans les normes en terme de contenu, mais la couverture est tout de même quelque peu trompeuse. Du côté du scénario, l’histoire est poignante : elle s’articule autour d’une histoire vraie particulièrement dérangeante, et prend en ampleur en s’appuyant sur ce contexte. La trame de fond est donc très ancrée dans la réalité, happant le lecteur grâce au personnage de Mallory.
 
Cette soldate, d’une certaine façon rongée par le remord, essaye tant bien que mal de retrouver ses marques dans un pays qu’elle a quitté pour faire la guerre. De retour chez elle, seule, sans son père, elle tente tant bien que mal de survivre avec un travail ennuyeux après des années intenses et stressantes sur le front. Ce personnage, alliant la dureté à la tendresse, est complexe. Le lecteur sait dès le début qu’elle a participé activement aux atrocités, et pourtant, cela ne l’empêche pas de s’y attacher. C’est en cela que la force de Joe Hill se fait ressentir : accepter Mallory comme elle est, malgré son passé chargé. Les protagonistes secondaires sont aussi très intéressants, bien que nettement relégués au second plan au bénéfice de Mall.

Le dessin quant à lui est particulier. Très carré et tranchant, il sert le scénario avec efficience. L’ambiance qui ressort est très sombre et oppressante. Il en découle une certaine violence, d'une rare intensité. La mise en couleur contribue à cette ambiance et à ce sentiment profond de noirceur et d’angoisse. La ligne choisie se justifie, et si elle peut rebuter au premier abord par son manque de finesse et de précision, c’est une fois plongé dans l’intrigue que l’on prend la mesure du choix effectué et de son efficacité.

L’ensemble est poignant, dérangeant et oppressant. Le fait que cela repose sur des faits réels n’y est pas étranger. La fin, terriblement efficace, donne une nouvelle vision qui n’était pas offerte par la nouvelle initiale, montrant que les auteurs ont su dépasser et réadapter un texte pour en faire une véritable adaptation en comics.

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