Le monde perdu - 2

Auteur prolifique depuis quelques temps, Christophe Bec est un auteur éclectique. Il s’illustre dans la BD avec des œuvres comme Sanctuaire (il y assure les dessins), ou alors au scénario de séries comme Prométhée, Pandemonium, Le temps des loups, Le meilleur job du monde, et tant d’autres encore. Difficile de résumer les dernières sorties tant elles sont nombreuses : Deepwater prison, Sibéria 56, Le monde perdu, Sunlight, Carthago… Il ne se cantonne pas à un seul genre : le fantastique, l’horreur, le réaliste, le thriller, rien ne lui fait peur. Mais son talent ne s’arrête pas à la BD, et il décide depuis peu de s’orienter vers les courts-métrages. 

 

Aux dessins, nous retrouvons deux artistes : d’un côté Fabrizio Faina, un italien architecte de formation, qui s’est depuis plus de 20 ans reconverti dans une carrière de dessinateur. Il travaille, en parallèle des cours qu’il donne, pour divers éditeurs italiens et français. Sur Le monde perdu, Faina est associé à Maura Salvatori, un autre dessinateur italien qui se consacre maintenant à son rêve de gosse : l’illustration d’histoires. Il a fait des apparitions pour l’illustration de dessin animé, mais c’est sur le support de la BD qu’il officie le plus. 

 

 

L’expédition du Professeur Challenger est enfin arrivée à bon port : la parcelle de terrain qu’ils visaient dans l’Amazonie est bel et bien prometteuse ! Ils sont nez à nez avec des dinosaures herbivores depuis longtemps disparus. L’émotion est palpable chez les chercheurs qui ont passé leur vie à décrypter ces animaux. Et elle est d’autant plus importante qu’ils se rendent compte à quel point ils avaient faux quant à ce qu’ils pensaient de ces dinosaures. Mais très vite ils vont déchanter : si certains de ces incroyables dinosaures sont inoffensifs, d’autres, carnivores, sont une source de problèmes majeurs.

 

C’est le cas par exemple du Spinosaurus Aegyptiacus qui ne laissera que peu de répit à l’équipe de Challenger. La survie va devoir alors s’organiser, et le voyage va prendre une autre tournure ! Les tours de garde la nuit vont s’enchaîner pour prévenir une attaque. Mais se pourrait-il que le danger vienne d’ailleurs ? 

 

 

La série Le monde perdu est une adaptation libre du roman de Sir Arthur Conan Doyle qui porte le même nom. Le projet de s’attaquer à un livre comme celui-ci est ambitieux, mais le résultat est bien là et ravira les lecteurs. 

 

Du côté du scénario, la trame du roman est bien suivie. Le narrateur reste Edward Malone, un scribouillard journaliste de seconde zone qui n’en est qu’à son début de carrière. Il espère, en participant à cette aventure trépidante, impressionner la belle Gladys, qui rêve d'avoir pour mari un aventurier qui sourit face à la mort. Toute la tension et la peur des personnages face à ce monde inconnu et hostile sont bien retranscrits au fil du récit. Les personnages sont tous très bien travaillés, et aucun n’est laissé de côté. Leurs relations, très intéressantes de par le caractère bien trempé de chacun, sont prenantes à suivre au fil des albums. Quelques flashbacks parsèment le récit, mais moins que dans le premier tome, au profit cette fois-ci d’une construction plus linéaire. 

 

Le lecteur remarquera peut être la présence de dinosaures qui, d’après les données actuelles de la science, ne se sont jamais rencontrés car séparés aussi bien géographiquement que temporellement. Mais après tout, l'intrigue prend comme postulat que les scientifiques se sont lourdement trompés sur la disparition des dinosaures. Alors pourquoi ne nous serions-nous pas trompés sur la vie qu'ils menaient ? Cela permet aussi de mettre en scène les plus beaux et les plus impressionnants spécimens, ce qui ne gâche rien. Le scénario mêle habilement l’aventure au suspense, et à l’action. Tout est réuni dans cet album pour convaincre le lecteur, et le réalisme de l’ensemble pourrait nous laisser imaginer qu’un tel endroit pourrait exister sur Terre. Après tout, qu'est-ce qui nous prouve que ce n’est pas le cas ? 

 

Le dessin est vraiment magnifique. On retrouvera un souci du détail aussi bien sur les personnages, et notamment les visages, que sur les décors, ce qui offre une très belle expérience aux lecteurs. Les décors sont variés, ce qui permet au talent des dessinateurs de s’exprimer et de nous montrer tout leur savoir-faire. Un vrai travail a été réalisé sur les dinosaures pour plus d’immersion et de réalisme, et l’ensemble est réellement convaincant. Certaines planches se démarquent par l’ensemble des personnages, décors, couleurs, et valent vraiment le détour. La lecture est aisée car le découpage est intelligemment réalisé. On ne s’y perd jamais, et il n’y a pas besoin de revenir en arrière pour retrouver une possible information à côté de laquelle on serait passé. Le choix sur le découpage a été de rester très classique, et ce n’est pas plus mal pour aborder un classique de la littérature d’aventure. La mise en couleur est réellement fantastique. Elle se prête totalement aux dessins, et l’ensemble sert avec brio le scénario. L’album est alors parfaitement homogène de la première à la dernière planche, ce qui n’est pas une mince affaire ! 

 

Un véritable coup de cœur pour ce deuxième tome d’une belle trilogie. Reste en suspens une certaine appréhension quant au troisième volet qui viendra clôturer l’expérience, en mettant fin à l’intrigue qui s’est lentement développée jusque-là. On espère en tout cas qu'il restera aussi brillant que ses prédécesseurs.