Le chevalier des épées

Mike Mignola - Les chroniques de Corum - Le chevalier des épées

De Moorcock à Mignola

Le personnage de Corum est une des incarnations du champion éternel créé par Michaël Moorcock au début des années 60 et dont Elric est le visage le plus familier aux yeux du grand public. Corum, le prince à la robe écarlate, apparaît dans un cycle de six livres dont Le chevalier des épées est le premier tome. Dans les années 80, Mike Baron, qui s’est fait un nom avec son compère Steve Rude sur la série Nexus, adapte chez First comics les chroniques de Corum et est assisté pour la partie graphique par un jeune talent : Mike Mignola. Nous sommes alors à la fin des années 80 et le futur créateur d’Hellboy multiplie alors les travaux : Cosmic odyssey et World of Krypton chez DC, plus tard Jungle saga chez Marvel. On va vite voir que son talent était très prometteur.

Le dernier de son espèce

Le prince Corum fait partie de l’espèce des Vadhaghs et réside avec sa famille au castel Erorn. Son père vient le chercher un jour en lui demandant d’aller voir sa famille car il n’arrive plus à entrer en contact avec eux. Corum part donc mais, à la place des châteaux Vadhaghs, il ne trouve que des ruines fumantes. Il découvre peu à peu que des troupes d’humains, qu’il appelle les Mabdens, emmenés par le sinistre Glandyth, massacrent les Vadhaghs, en se servant de leurs ennemis ancestraux Nhadraghs qu’ils ont réduit en esclavage pour les « pister ». Corum revient pour avertir sa famille, trop tard malheureusement. Torturé par Glandyth qui lui coupe une main et lui arrache un œil, il réussit néanmoins à se transférer sur un autre plan et est sauvé par un géant sauvage, l’homme brun de Laar. Corum finit par trouver asile dans le château de la margravine Rhalina. Auprès d’elle, il reprend des forces et apprend à aimer. Mais Glandyth et ses troupes le retrouvent et assiègent le château. Pour les sauver, Rhalina fait appel à la magie. Pour la sauver de cette magie, Corum devra affronter le chaos lui-même et son champion, le chevalier des épées, Arioch.

Un résultat enthousiasmant

Très fidèle à l’esprit du roman, le scénario de Mike Baron restitue l’ambiance désabusée et envoutante de l’œuvre de Moorcock. Songeons à cet échange entre le triste prince et un Nhadragh blessé :

« -Je ne sais pas comment on fait pour tuer.

-Alors, tu dois apprendre, Vadhagh ! tu dois apprendre ! »

On est là aux antipodes d’Howard et de ses héros parfois violents. Howard et Moorcock, deux auteurs contraires et pourtant emblématiques de la fantasy… Saluons ici le graphisme de Mignola, étrange et onirique, parfois maladroit (pensons au menton et au nez très pointus de Corum). Reste que pour une œuvre de jeunesse, on est déjà dans quelque chose de différent, loin du graphisme de John Buscema sur Conan, plus proche peut-être de P.Craig Russel. Saluons l’initiative de Delcourt de nous proposer ces histoires en français pour la première fois et attendons la suite.

Sylvain Bonnet