Les Affamés

Silène Edgar - Les affamés

Une incursion dans la science-fiction pour une auteure à succès

Jusqu’ici, Silène Edgar, professeur de français, avait surtout publié des romans pour la jeunesse comme 14-14, coécrit avec Paul Béorn (Castelmore, 2016) qui avait remporté le prix des Incorruptibles. Avec Les affamés, elle nous livre comme on va le voir une dystopie assez noire et bénéficie d’une préface enthousiaste de Pierre Bordage, l’auteur des guerriers du silence.

SOS d’un écrivain en détresse

Au milieu du XXIe siècle, la France a réussi sa transition écologique (miracle !) et a changé de modèle de société. Charles est un écrivain d’une cinquantaine d’années très célèbre et qui a une vie »borderline » : il boit pas mal, mange bien et couche avec ses admiratrices malgré (à cause de ?) son mariage avec la belle Jude qui lui a donné deux enfants. Il est loin, très loin de la réalité sociale : la France est désormais régie par les Lois de la santé qui classe la population en « inutiles » et « utiles », cette dernière comprenant cinq niveaux. Charles est un Utile de classe 5, un privilégié. Mais ses romans font l’apologie du sexe et de l’alcool et ne témoignent pas d’une adhésion franche au nouveau modèle français. Lorsqu’un politicien habile se fait élire en promettant de mettre les écrivains et la littérature au pas, Charles se voit sommé de réécrire son roman. Il ne peut pas, malgré les pressions de son éditeur et de sa femme. Charles se met à fuir le monde, chez ses parents d’abord puis en fréquentant des rebelles. Le charme de la jeune Salomé n’y est pas pour rien. Il découvre ainsi que le meilleur des mondes est en fait un cloaque puant…

Ne jamais mais alors jamais bouder son plaisir

Le critique blasé (un critique est toujours blasé, voyons) ressort enthousiaste d’un roman comme Les affamés. Il s’agit en effet d’une dystopie d’un univers où l’écologie et la santé sont devenues en fait les paravents d’un état tenté le contrôle totalitaire des populations. Charles est égoïste, narcissique, égocentrique. C’est aussi un écrivain et un rebelle qui n’hésite pas à remettre en cause toute sa vie, y compris sentimentale, parce que le système, dont il a pourtant bien profité, lui a pourtant bien profité. Naïveté ? Mais nous sommes tous naïfs mon pauvre monsieur, nous aimons tous notre confort ! Mais lui, il y renonce. Voilà en tout cas un roman qui plaît et qui fait réfléchir.

Sylvain Bonnet