Le label Série B de Delcourt a toujours frayé plus ou moins avec la science fiction et d'une manière plus large avec l'Imaginaire dans son ensemble. En ce printemps, ses responsables lancent une nouvelle collection dédiée à l'Uchronie : Jour J. Leur idée est simple : faire diverger l'histoire à un instant T et en examiner les conséquences. Imaginons que l'Allemagne ait gagné la Première ou la Seconde guerre mondiale, que JFK ait été assassiné dix ans plus tard ou que les révolutionnaires de 68 aient gagné leur pari... Voilà de quoi changer la face du monde...

Pour le premier volume de la série, ils ont choisi de changer d'abord l'histoire de la Lune. La fusée américaine de 1969 avec Armstrong et Aldrin est détruite quelques instants avant l'atterrissage par une météorite. Un drame qui permet aux Russes d'être les premiers à poser le pied sur l'astre lunaire et à y construire une base lunaire. Les américains finiront eux aussi par y arriver et à s'installer. Sauf que sur la Lune, la Guerre Froide perd peu à peu de son importance et les astronautes des deux camps commencent rapidement à collaborer en cachette...  Jusqu'au jour où leurs hiérarchies respectives découvrent les écarts de leurs équipes lunaires...

Trois auteurs expérimentés

Avant de concevoir ce one shot, Fred Duval, Jean-Pierre Pécau et Philippe Buchet ont déjà largement goûté au fantastique, à la fantasy et à la science fiction. Fred Duval s'est notamment illustré avec le très SF Carmen McCallum puis avec une série steampunk, Hauteville House. Philippe Buchet nous a lui emmené à travers les étoiles avec les aventures de Nävis dans la série Sillage. Quant à Jean-Pierre Pécau, son goût pour l'histoire a fait merveille avec les séries Arcanes et L'Histoire Secrète.

Pari réussi

Le trio s'est aventuré sur les terres de l'uchronie avec ce premier tome de la collection Jour J et c'est plutôt une réussite. Ils jouent à merveille avec l'Histoire pour, à partir du point de divergence avec notre réalité, imaginer un scénario étonnant, une sorte d'éclaircie, presque d'utopie, en pleine Guerre Froide. Ils montrent comment les barrières entre les peuples sont vaines lorsqu'on éloigne les hommes de leurs nations, et encore plus lorsqu'ils se retrouvent dans l'espace, obligés de collaborer pour survivre. Tout juste regrettera-t-on que sur certaines planches, les très réussis dessins de Buchet aient des fonds de couleur unis, sans aucun détail. Et pour chipoter, il semble que les scénaristes aient pris quelques libertés avec les contraintes scientifiques. Mais ce ne sont que des défauts mineurs. L'album augure bien de cette série. C'est un très bel exemple de ce que l'uchronie peut avoir d'exaltant. Manipuler l'Histoire, c'est souvent donner un attrait supplémentaire aux récits. C'est exactement le cas ici. Un très bon album...