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L'Homme dans le labyrinthe

Aux éditions :   -  Collection : 
Date de parution : 31/03/03  -  Livre
ISBN : 2290332887
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Eric   - le 20/09/2018

L'Homme dans le labyrinthe

Même si l'on considère la piètre qualité de certaines de ses contributions, avec trente romans publiés en quatorze années de carrière. Robert Silverberg affiche en 1968 un palmarès dont bien peu d'auteurs du genre peuvent (et pourront) se targuer.

Il sait pourtant, qu'il n'a pas encore donné le meilleur de lui-même. S'il vit désormais confortablement de sa plume, les productions standards qu'il livre lui laissent un sentiment de frustration de plus en plus exacerbé. C'est la fréquentation assidue d'auteurs bien plus décomplexés, comme Harlan Ellison, et les encouragements de rédacteurs en chef tels que Frederick Pohl, qui vont finalement le pousser vers une science fiction plus personnelle, tournée vers l'humain et profondément emprunte de doute.

Dès 1966 Silverberg se fait la main sur de nombreuses nouvelles qu'il place auprès de If et de Galaxy, mais il franchit avec L'Homme dans le labyrinthe une nouvelle étape. C'est une sorte de pari. Et un pari payant puisque ce roman reste une référence absolue, en même temps qu'il marque un tournant décisif dans la carrière de Robert Silverberg.

L'histoire de Muller, qui choisit de s'exiler aux confins de la galaxie, va laisser dans l'univers de la littérature SF une empreinte indélébile.

L'exil volontaire

Premier homme à avoir été envoyé en mission auprès d'une espèce alien, Muller est revenu de son séjour frappé d'une étrange malédiction : il ne peut cacher l'aura de son âme à ses semblables. Il exsude en permanence ses sentiments les plus profonds. Son amour, certes, mais aussi les penchants les plus noirs de sa personnalité. Son envie, ses jalousies et ses haines, ses doutes et ses peurs. Si son inhumanité en fait, au fond, le plus humain de tous les Humains, puisqu'il est incapable de dissimuler sa nature profonde, sa seule présence suffit à conduire toute personne l'approchant au seuil de la folie.

C'est pour ça qu'il a choisi se s'exiler sur Lemnos, et d'aller vivre au cœur du Labyrinthe.

On ne sait rien de ceux qui ont construit cette ville en forme de dédale. Nombreux sont ceux qui s'y sont risqués, pour finalement tomber, victimes d'un des nombreux pièges que recèle l'improbable cité.

Aussi, lorsque Ned Rawlins et Charles Broadman décident de faire le voyage jusqu'à Lemnos pour ramener Muller, ils ignorent s'il a survécu à neuf années dans le Labyrinthe. Ils l'ignorent, mais l'espèrent, car la Terre à de nouveau besoin de lui.

Une étape

Pour un coup d'essai, Robert Silverberg choisit un cocktail de thèmes particulièrement ambitieux. A la mise en abîme du pouvoir et de l'usage qu'on en fait, il ajoute une profonde réflexion sur la nature humaine. Profonde et sombre, qui n'est d'ailleurs pas sans rappeler celle qu'il conduira trois ans plus tard avec L'Homme programmé. Là encore il est question de la part d'ombre que nous gardons en nous, et de l'impossibilité d'être soi-même totalement, sous peine de perdre toute existence aux yeux du monde. Il écrit là sur le faux-semblant social, source de tous les mensonges consensuels et, par conséquent, de tous les doutes.

La forme reste assez classique. On ne sent pas encore tout à fait la maîtrise qui illuminera L'Oreille interne ou Les Monades Urbaines, mais les thèmes sont abordés avec une sincérité urgente.

C'est une série de problématiques tout à fait atypiques des standards de cette époque ou seuls les plus marginaux des auteurs se risquaient sur des territoires qui semblaient, de prime abord, aussi peu porteurs d'imaginaire. La force de L'Homme dans le labyrinthe réside indubitablement dans le fait qu'elle a su dépasser sa spécificité d'alors pour rester une œuvre intemporelle et porter son message bien au-delà des générations.

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