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Le fils de l'Homme

Robert Silverberg ( Auteur), J. Paternoster (Illustrateur de couverture), Jacques Guiod (Traducteur)
Aux éditions : 
Date de parution : 30/04/03  -  Livre
ISBN : 2253072516
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Eric   - le 20/09/2018

Le fils de l'Homme

Si l'héroïne transpire des œuvres de Burroughs, si les amphétamines ont enfermé Dick dans une écriture de plus en plus paranoïaque, Le fils de l'Homme, lui, est un roman profondément marqué par le LSD.

Publié en 1971, il fût en fait écrit en 1969, alors que l'acide lysergique diéthylamide envahissait les rues américaines et que jeunes et moins jeunes expérimentaient les Orange Sunshine, ces petits buvards jaune imbibés de drogue.

Silverberg l'admet lui-même, Le fils de l'Homme est une tentative pour saisir l'essence d'une époque, celle du psychédélisme. Il est douteux qu'à 34 ans, il ait cru en ce grand flot d'amour universel dont le LSD était sensé ouvrir les vannes. En revanche, il était inévitable que sa quête stylistique s'enrichisse de l'engouement général pour ces fameuses drogues sensées ouvrir en grand les portes de la perception.

Comment dit-on "perdu" dans le futur ?

Il semblerait que cela ait assez bien fonctionné, s'il on en juge d'après les aventures de Clay, emporté dans le flux temporel vers un futur de l'humanité tellement lointain qu'il en perd, et nous avec lui, tout repère. Délibérément, Silverberg quitte le consensuel pour le sensuel, car Le fils de l'Homme est avant tout un roman des sens. Intensément voluptueux, empli du plaisir des mots. Des mots pour les couleurs, pour les formes, pour les plus impalpables des sensations. Le fils de l'Homme est tout entier tourné vers le symbolique. Jusqu'à ce nom "Clay" - argile -, comme l'argile du golem du Rabbi Low, comme l'argile du potier aussi. Car ce monde va bel et bien finir par façonner notre héros pour en faire, à son tour, une œuvre d'art.

une magie étrange

Même si jamais, la forme n'est totalement sacrifiée au fond, l'intrigue importe moins que la composition. Elle ne sert que de fil d'Ariane à cette symphonie textuelle, sauvant toute la démarche de la gratuité. Car il est évident, qu'avec Le fils de l'Homme, Robert Silverberg est allé au bout de ses expérimentations stylistiques. Œuvre atypique, il admet volontiers que, soit "on ne dépasse pas la troisième page", soit "on fait partie de sa minorité active de fans qui la relit régulièrement". Il y a dans ce roman une magie étrange, qui peut-être tient au fait que Silverberg a réussi là où nombre des ses confrères ont échoué, en livrant un roman à la fois extrême dans sa forme et accessible dans son fond.

Le fils de l'Homme pourrait paraître anachronique, et sans doute, à certains égards, l'est-il un peu. Il ressemble à un morceau des Byrds, complexe au-delà d'une légèreté de propos, élégant parfois jusqu'à la vanité, mais étrangement envoûtant. On aime ou on déteste, mais vous ne pourrez pas le savoir avant d'avoir vous-même tenté l'expérience.

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