Jack Vance a aujourd’hui 87 ans. Né à San Francisco, il s’est mis à la science fiction en 1945. On le dit père du Space Opera, misogyne et talentueux. C’est surtout le genre d’auteur dont tout fan de fantasy et de SF vous parlera et glissera dans sa bibliothèque idéale. Auteur connu et reconnu, Jack Vance répugne à diffuser des éléments biographiques aux journalistes, afin que les lecteurs se concentrent sur ce qui lui importe réellement : son travail. Pour ceux qui n’ont pas encore eu la chance de le découvrir, J’ai Lu le réédite, à la suite de quelques autres maisons d’édition, et ce, après des années d’oubli…
Cugel le voleur
Cugel est un petit voleur sans envergure, mais à la langue agile et l’arrogance facile. Pris sur le fait, alors qu’il tentait de dérober les biens de Iucounu le Magicien Rieur, il doit aller chercher pour ce dernier une lentille violette laissée sur terre par les démons. Pour s’assurer de sa loyauté, Iucounu lui place dans l’estomac une créature dont la principale caractéristique est de le rappeler douloureusement à l’ordre s’il vient à se détourner de sa mission.
D’étonnement en étonnement
Jack Vance est un conteur. Et, en bon conteur, il n’a pas besoin de s’appuyer sur une longue introduction du monde et des personnages : ils existent, peu importe la genèse ! Le monde de Vance (connu par son talent de créateur d’univers) joue sans cesse avec les clichés. De montagnes ténébreuses en auberges inhospitalières, de voyageurs sans scrupule en villageoises primesautières, Cugel suit son chemin sans s’encombrer de bons sentiments. Il est, en effet, le modèle même de l'anti-héros. Mauvais, arrogant, drôle, ridicule, grandiose, ce genre de personnage séduit dès la première ligne et constitue le point fort du roman. Car, si Cugel ne représentait pas si bien le voleur piteux et royal qui joue sa vie à quitte ou double, peut-être accrocherait-on moins à ce monde de fantasy devenu sans aucun doute pesant sans l’humour débridé que le voleur apporte. L’humour, la magie, et une vision terriblement raisonneuse du monde (pour le plus grand plaisir du lecteur), voilà ce qui pourrait résumer Cugel L’Astucieux.
Bref, Cugel L’Astucieux, roman prenant la plupart du temps, reste un grand classique, ne serait-ce que parce que l’on sent en lui les bases posées de tout un genre. Et même si on peut râler sur le rôle des femmes dans ce roman, il y colle inexorablement en omettant les caractères féminins forts, voire simplement pensants. Etonné, on l’est ! Ravi, aussi... Cela dit, si Cugel L’Astucieux se place sans conteste dans cette fameuse bibliothèque idéale que tout fan devrait avoir, il lui manque une toute petite chose pour accéder au chef d’œuvre… Un peu de profondeur, un rien de consistance, un soupçon de féerie…