Croisades

Croisades

A bientôt 90 ans, Jack Vance possède une œuvre riche allant de la fantasy comme son premier roman écrit en 1950, Un Monde Magique (J'ai Lu) au Space Opera épique et chatoyant de la trilogie d'Alastor, Jack Vance s'est imposé au fil du temps comme un maître ès Sense of Wonder. Folio SF nous propose de redécouvrir une facette de l'auteur qui pour beaucoup reste encore méconnue : ses talents de novelliste.

Quatre longues nouvelles dont une inédite

Ce présent recueil, magnifiquement illustré par Philippe Gady, contient deux nouvelles précédemment publiées dans Bateaux ivres au fil du temps et Dans la cité future (2 des 36 volumes de l'excellentissime et indispensable anthologie Autres temps, Autres mondes de Casterman). La troisième se trouvait scindée en deux parties dans la revue Fiction et la dernière n'avait jamais été éditée en France jusqu'ici.

La grande Bamboche

Alan Robertson a sauvé le monde de la surpopulation, de la pauvreté et de la guerre. Ayant construit une machine qui abolit les frontières du temps et de l'espace, il a offert à tout un chacun le moyen d'utiliser des ouvertures comme bon lui semble vers d'autres mondes parallèles. Mais un jour, un homme voit tous les accès à son monde et par conséquent à sa famille fermés. Est-il victime d'un complot ou juste d'une mauvaise blague ? Sur le thème classique des mondes parallèles, Vance produit un texte au final brillant qui s'interroge sur ce que l'on a le droit - et même si on possède ce droit - de changer au passé.

Les œuvres de Dodkin

Luke Grogatch est un ouvrier dont l'esprit rebelle n'a cessé de le faire rétrograder dans la hiérarchie. Il se retrouve à l'avant-dernier barreau de l'échelle sociale lorsqu'une circulaire demande expressément à tous les ouvriers de ramener leur matériel tous les soirs au magasin dans le seul but de réaliser des économies. C'en est trop pour Grogatch à qui on rajoute trois heures de travail supplémentaires par jour et bien entendu non rémunérées. Quitte à être à nouveau rétrogradé, et finir sa vie dans le dénuement le plus total, il va se lancer à la recherche du technocrate qui a rédigé cette note afin de lui faire prendre conscience de l'absurdité de la directive. Il se heurte alors à une bureaucratie démentielle… La satire est plutôt inhabituelle dans l'œuvre de Vance et le résultat assez drôle et cynique.

Les Faiseurs de miracles

Sur une planète, les descendants des humains, depuis plusieurs siècles délaissés, sont revenus à un système moyen-âgeux où les seigneurs se livrent des guerres interminables. Lord Faïde est un conquérant. Il est en route vers Fort-Ballant : le dernier bastion de résistance. Conseillé par de nombreux envoûteurs et mages, il s'apprête à lancer l'ultime attaque mais se soucie de plus en plus du premier peuple : les êtres qui habitaient cette planète lorsqu'ils ont débarqué. Peu à peu, cette espèce que l'homme n'a cessé d'écraser s'est organisée pour vaincre ceux qui leur ont volé leur terre… La plus vancéenne des quatre nouvelles de ce recueil : un régal.

Les Maîtres de Maxus

Dyle Travec arrive sur Maxus avec la ferme intention de racheter sa famille récemment enlevée par un esclavagiste. Il a vendu tous ses biens pour cela mais malheureusement, il se heurte très rapidement au cynisme et à l'injustice la plus totale, les maîtres de cette planète étant à la tête de l'ensemble du système politique, économique et social de l'univers. Action, rebondissements et réflexion sur l'esclavagisme et sur la révolution sont les plus grandes qualités de ce texte de 1951 annonçant déjà les grandes orientations de l'œuvre de Vance.

Et une bonne pioche, une !

Voilà un recueil bien agréable. De ces quatre longues nouvelles, on retiendra plus particulièrement Les Faiseurs de miracles qui immerge le lecteur dans un univers que Vance aurait pu développer en une série digne de Tschaï. La Grande Bamboche et Les Oeuvres de Dodkin sont de facture beaucoup plus classique. Les Maîtres de Maxus annonce très clairement par le thème abordé (la vengeance d'un homme solitaire et sa lutte contre les puissants) un de ses cycles les plus connus : La Geste des Princes Démons. A lire.