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La Frontière Invisible-2

François Schuiten (Dessinateur, Coloriste), Benoît Peeters (Scénariste)
Aux éditions : 
Date de parution : 31/03/04  -  BD
ISBN : 2203343184
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Eric   - le 31/10/2017

La Frontière Invisible-2

Le douzième album de la série des Cités Obscures initié par Schuiten et Peeters sort un peu du cadre habituel qu'ils s'étaient jusque là imposé. La moindre de ces différences est finalement cette sortie en deux tomes suggérée avec insistance par Casterman.

Ouvert avec Les Murailles de Samaris et primée ensuite à Angoulême pour La Fièvre d'Urbicande l'exploration des Cités obscures se heurte pour la première fois à ses propres limites.

Une étrange tâche de naissance

Dans le premier tome nous faisions la connaissance de Roland de Cremer, jeune étudiant entrant à l'institut de cartographie de Sodrovno-Voldachie. Passionné de cartes, et fils d'un éminent cartographe, Roland avait rapidement gravit les échelons de cette vénérable institution où les scientifiques vivent en vase clos. Sortant rarement de ce bâtiment en forme de dôme perdu au milieu d'un désert, ils ne fréquentent guère d'autre endroit que le "Club", un bordel où Roland fait la connaissance de Shkôdra, une pensionnaire qui a au bas du dos une étrange tâche de naissance dont les contours rappellent au jeune homme les frontières originelles - et bien exiguës - de la Sodrovno-Voldachie.

Voilà qui serait embarrassant pour cet état paradoxalement nationaliste et annexionniste qui s'est depuis longtemps attaché à se définir au moyen de ses frontières en constante expansion. Dépositaire de cette illusion expansionniste, l'institut de cartographie est d'une importance capitale pour le maréchal Radisic, qui a décidé d'en faire l'outil principal de sa politique de propagande. Ne lésinant pas sur les moyens, il le modernise, et place à sa tête une toute nouvelle génération, à laquelle appartient Roland de Cremer.

De retour de congé, ce dernier retrouve un institut sens dessus dessous. La vieille garde des cartographes est mise au placard, et un machinisme approximatif et anarchique est désormais aux commandes. Au milieu de ce chaos, Roland est obligé de faire des choix cruciaux pour son avenir. Dans une ambiance d'étrange paranoïa, et de plus en plus convaincu que Shkôdra a, inscrit dans sa chair, de quoi saper les fondations même de la Sodrovno-Voldachie, il décide de la soustraire au sicaires du pouvoir. C'est précisément à ce moment là que lui parvient une convocation du Maréchal Radisic.

Maniaque...

La diversité des thèmes abordés par Schuiten et Peeters est tout à la fois enthousiasmante et ambitieuse. De la découverte de la vie par un adolescent, aux tristes illusions du pouvoir, des visions imbriquées du monde par le prisme des cartes à la place de l'homme dans le jeu du progrès, les doubles lectures s'accumulent, s'empilent les unes aux autres, pour finalement… se délayer irrémédiablement. Les deux tomes achevés on reste frustré. Sur sa faim. Les brutales ellipses du scénario laissent une sensation d'inachevé, d'une hâte de mauvais aloi. Les limites auxquelles se heurte l'univers des Cités Obscures sont en fait celles de leurs auteurs, qui se disent un brin lassé de la série, dont ils se sentent de plus en plus prisonniers. C'est d'ailleurs assez clair dans cet épisode qui se passe en grande partie en vase clos, et s'achève dans la nature, loin, bien loin des villes.

Certes le trait de Schuiten est toujours aussi précis et maniaque, et Peeters reste ce Jules Verne un peu psychédélique qui nous a tant séduit, mais le charme s'estompe un peu, et nous laisse dans la bouche un goût de terre amère. De cette terre dont fait les briques. Les briques avec lesquelles jadis furent édifiées de si belles cités. Des Cités Obscures.

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