La peau sur les os
Richard Bachman a écrit ce livre en 1984. Cet auteur est sortit de l’anonymat en 1977 avec un premier roman appelé Rage. Ce ne fut qu’un succès d’estime. Malheureusement, cette image d’auteur passé à coté de la gloire va continuer à le poursuivre malgré la parution en 1982 de l’excellent Running man.
Cependant, la reconnaissance lui viendra après son décès, en juin 1985, d’un cancer généralisé.
Il va bénéficier de l’appui du grand auteur Stephen King, avouant que Bachman et lui ne faisait qu’un. Ainsi, le pari de King, d’essayer de vendre des livres qui ne joueraient pas sur son nom d’auteur mais plutôt sur le contenu, fut perdu.
La peau sur les os est le dernier livre paru du « vivant » de Bachman.
L’état de graisse
Billy Halleck, avocat, marié et père satisfait, vit dans la petite ville de Fairview (Connecticut). Seule ombre au tableau, son poids de 112 kg.
Alors qu’il est au volant, il tue une vieille femme gitane qui traversait la route. Etant un notable de la ville, jouant au golf avec le juge et connaissant le chef de la police, le verdict conclut à l’accident.
Alors le vieux gitan, chef de la tribu, lors de la sortie du tribunal s’approche de Billy et lui caresse la joue en murmurant à son oreille, MAIGRIT !
Et l’enfer de l’amaigrissement ouvre ses portes à William Halleck.
Au menu : satire sociale
Richard Bachman met en scène, sur un ton franchement ironique voire cynique, son héros dans la vie de tous les jours. Il met en avant l’image qui évolue en fonction de la perte de poids. Si tout va pour le mieux au début avec une amélioration des rapports avec sa femme, l’anormalité de la perte de poids fait de Halleck une étrangeté puis un cas médical très intéressant puis un monstre.
Avec le regard des autres qui est omniprésent, le héros se juge et se moque ironiquement de lui dans une vaine tentative de réassurance.
Mais, à aucun moment, il n’accepte sa culpabilité. Il se ment à lui-même en pensant être victime d’une injustice et finit par rejeter la faute sur sa femme, sur la société, sur ses anciens amis et sur ses nouveaux ennemis.
Le thème du poids, si l’on se rappelle le contexte (1984), est savoureusement abordé. A l’époque, il faut être beau, mince, irréprochable. Richard Bachman pousse la contradiction de cet homme qui perd du poids et qui va inquiéter son entourage parce que de gros, il va devenir maigre. Tout l’inverse du mannequin de mode de l’époque !
Enfin l’opposition d’un père de famille dans la haute société d’une petite ville des U.S.A. face à une tribu de gitans, éternels voyageurs, rejetés d’une société sédentaire faites de normes étalonné par le dollar, est parfaitement mis en scène par l’auteur.
La malédiction gitane se voit contré par la malédiction de l’homme de la ville, obligé d’utiliser les mêmes armes que son ennemi.
L’horreur et le fantastique n’est finalement que le prétexte conducteur d’une satire sociale sur l’Amérique WASP des années 80.
Bonne cuisine quoique un peu classique
Ce livre est bon, même s’il a un peut vieillit. L’auteur a le mérite de sortir des sentiers battus : Contrer le sort jeté par le gitan avec un mafiosi violent et l’intégrer comme la moderne malédiction des hommes de la ville est original.
Si la fin ne sacrifie pas à la tradition du rebondissement des romans d’horreur, ce récit n’en est pourtant pas un chef d’œuvre ; ce que gagne Stephen King en allégeant son style, Richard Bachman le perd dans le manque d’épaisseur de son histoire.
Un livre à déguster sur le pouce entre la poire et le fromage.