Christian
- le 31/10/2017
Energy business
Après Akademy, Flamingo, Watch, l’éditeur Delcourt lance une nouvelle série d’espionnage et de politique fiction : Egide. La collection « Au cœur de l’intrigue », qui se veut forte en actions et en émotions, fleure bon le genre « série américaine franco-allemande ».
Cette série ne fait pas exception. Du nom du bouclier de la déesse Athéna (Egide), l'agence de contre-espionnage est placée sous "l’égide" de sept services secrets européens. Elle est spécialisée dans la lutte contre l’espionnage technologique et les manipulations politiques dirigées contre l’Europe. Un groupe d’espions, zélés, décérébrés et propres sur eux jouent un remake actualisé de Mission : impossible. Il ne manque que l’autodestruction de la cassette en début d’album…
Les deux auteurs, Fred Weytens et Denis Rodier, ne sont pas des inconnus puisque le premier a scénarisé Mambo Marcel, Tango pour un Berliet et que le second a collaboré à de nombreux comics au Canada (Batman, Captain America, Wonder Woman). Le duo d’auteurs constitue, en revanche, une première.
Sur les traces d’un saboteur
A la demande du représentant d’un pays africain, l’agence Egide enquête sur un ex-agent russe, suspecté de s’intéresser de près à une centrale nucléaire. En le filant, elle repère une autre russe, Aléna Doukovna, qu’elle va tenter de recruter, puis elle découvre que l’ex-agent a pour projet de saboter la mise en place d’un satellite européen révolutionnaire en matière de production d’énergie. Tout doit être fait pour l’en empêcher…
Europe mondialisée, BD sérialisée
Du rebondissement, de l’action, la collection nous en promet. Et nous en avons. La traque d’un agent secret malintentionné est le prétexte à des poursuites à moto, en voiture, sur les toits, à des explosions, des sauts d’hélicoptère. Sans décompter les comptes à rebours et la couleur des fils du détonateur à sectionner (« Le rouge, coupe le rouge ! »). C’est du story-board de film US grand public. A mi-chemin entre Mission : impossible et un blockbuster conçu pour Steven Seagal. La trame politique, esquissée en début d’album, est vite reléguée au rang d’accessoire. Dommage, car c’est elle qui sert d’argument de vente pour le prochain album. Le scénario est efficace, mais tout, en dehors du cadre européen et du satellite à rayonnement solaire, est réchauffé. On eût aimé du plus culturel, du plus politique, du plus humain ou du plus « européen ».
Les dessins ont une vraie tonalité « comics ». Si l’on excepte quelques décors léchés de guide touristique, les cadres sont centrés sur des corps en mouvement ou sur des visages « people magazine». Les dessins sont solides. Les expressions et les gestes paraissent naturels. Les erreurs de proportions ou les variations de forme des personnages sont plutôt rares. On regrettera le manque d’audace des prises de vue et les rides superflues sur les joues de certains personnages. Autre référence aux comics, tout paraît conçu pour du noir et blanc. En dépit des effets d’ombre, la couleur paraît plaquée sur un dessin qui se suffit manifestement à lui-même.
Une série professionnelle, avec minima de suspense, d’actions et d’esthétique garantis, mais sans âme et sans génie. Bref, de l’énergie et du business.