stephaneg
- le 20/09/2018
Un rouquin de trop
Thierry Gloris est un scénariste de bandes dessinées qui a déjà œuvré, avec Mickaël Bourgoin, sur la série du Codex Angélique. C'est un passionné d'histoire, qui a travaillé pour des journaux sur ce thème en indépendant. Mais c'est aussi un fan de fantastique. Waterloo 1911 est la fusion de ces deux centres d'intérêt.
Emiliano Zarcone, italien, a étudié à l'École Internationale de Comics. Inspiré par les bandes dessinées américaines et italiennes, mais également par les mangas, il a travaillé pour des revues érotiques avant que Thierry Gloris ne le contacte pour qu'ils œuvrent ensemble sur la série Waterloo 1911.
Mais qui a donc commis le vol au musée ?
C'est la question que se pose Alcée Poivron, conservateur adjoint au Musée des Colonies Impériales. En effet, on a volé une sphère mystérieuse, bijou de la collection des civilisations antiques du MCI. La gendarmerie ne s'est pas vraiment intéressée à l'affaire. Du coup, Poivron se tourne vers un enquêteur privé, Théophile Duroc.
L'enquête commence. Elle se déroule dans un Paris du début du vingtième siècle qui suivrait la victoire de Napoléon à Waterloo en 1815, et la constitution d'un empire français étendu sur plusieurs continents...
Un album peu convaincant
Waterloo 1911 est une bande dessinée steampunk. Dès la première planche, avec l'apparition d'une espèce de fiacre à vapeur, le lecteur est plongé dans une époque certes pas victorienne, mais napoléonienne, qui correspond au genre. Car le postulat de départ de cette nouvelle série est une uchronie relativement classique : Napoléon n'a pas perdu à Waterloo. Il a conquis de vastes territoires et la France, forte d'un empire colonial que seul concurrence celui des Anglais, est la première puissance mondiale dirigée par un descendant de Bonaparte.
L'auteur dispose d'un univers foisonnant, empreint d'une ambiance très particulière et du charme suranné d'un début de vingtième siècle conquérant. Or, dès le début de l'album il met en place une atmosphère sombre, inquiétante, la pluie battante et l'hôtel particulier plongé dans la pénombre de la nuit parisienne. Elle sera conservée tout au long de la bande dessinée, appuyée par des couleurs à dominante froide, signées Virginie Blancher et Lorien.
Toutefois, le travail de ces derniers ne met pas particulièrement en valeur le travail d'Emiliano Zarcone, le dénaturant même, effaçant les expressions des personnages sous des jeux d'ombre trop appuyés.
Le scénario, signé Thierry Gloris, joue sur des références explicites à Conan Doyle et à Edgar Allan Poe. Rien que sur le quatrième de couverture, Duroc, le personnage principal, est défini comme le Sherlock Holmes français. La référence à Poe, il faut la trouver dans une révélation à laquelle amène l'enquête.
Mais des références aussi illustres, si elles sont intéressantes et amusantes, ne font pas tout. Or Gloris échoue à captiver pleinement le lecteur avec une enquête qui s'emmêle dans des fausses pistes complexes et qui avance plutôt grâce au hasard que par les talents des protagonistes.
De plus, on se demande qui est le personnage principal de l'aventure. Est-ce Alcée Poivron, le conservateur, personnage fadasse auquel on a le plus grand mal à s'attacher car on peine à s'y intéresser, ou Duroc, individu bien plus charismatique, mais qui devrait en toute logique disparaître de la suite de la série ? Le résultat final est l'apparition d'un sentiment mitigé du lecteur concernant Un rouquin de trop et Waterloo 1911.
On pose l'album, après l'avoir lu, sans être convaincu de lire le tome deux (la série devrait en compter trois).