La Voie martienne

Au cours de sa carrière prolifique, il rédige plus de cinq cents livres – romans et anthologies pour la plupart, mais également ouvrages de vulgarisation.  En 1955, au moment de la publication de La Voie martienne, Asimov est au sommet de sa forme et ne cesse d’écrire : plongé dans la rédaction des deux grands cycles qui feront sa postérité – Les Robots et Fondation –, voilà maintenant seize ans qu’il est régulièrement édité et que le succès est au rendez-vous. La Voie martienne est un recueil de nouvelles qui réunit quatre histoires préalablement publiées dans divers magazines pulps : outre le récit qui donne son nom à l’ouvrage, originellement paru en 1952, on y trouve  "Ah ! Jeunesse" (1952), "Les Profondeurs" (1952) et"L’Attrape-nigaud" (1954). 

 

 

Jusqu’à présent, Mario Rioz, un colon martien, gagnait sa vie en ramassant les déchets métalliques abandonnés dans l’espace. Mais lorsque le conflit économique qui oppose la Terre à Mars s’aggrave au point d’interdire aux Récupérateurs de faire leur travail et de stopper l’envoi de la précieuse eau nécessaire à la survie de la colonie, il lui faut bien prêter attention à l’idée saugrenue de son collègue Ted Long : pourquoi les Martiens auraient-ils besoin de la Terre ? Les anneaux de Saturne recèlent toute la glace dont l’on peut rêver… mais encore faut-il pouvoir s’y rendre !

 

Dans "Ah ! Jeunesse", un homme d’affaires et un scientifique désespèrent de voir arriver les commerçants venus de l’espace dont la visite a été organisée avec tant de soin ; ils ne savent pas que leurs fils, Moustique et Carotte, se réjouissent quant à eux d’avoir trouvé d’étranges bestioles durant la nuit et espèrent pouvoir les cacher dans la grange jusqu’à l’arrivée du cirque … 

 

Dans les profondeurs d’une planète vouée à la mort, Roi est le détenteur d’une mission capitale : trouver dans l’espace, grâce à la télépathie, le monde qui pourra devenir le nouveau refuge de son peuple.

 

Enfin, "L’Attrape-nigaud" raconte le déroulement d’une expédition scientifique menée sur la planète Troie afin de découvrir ce qui a tué tous les précédents colons. Pour être certaine de ne rien laisser au hasard, l’équipe réunit de nombreux spécialistes : mais le docteur Sheffield, psychologue de son état, a surtout foi en son jeune protégé pour résoudre l’énigme. Après tout, Mark Annuncio n’est peut-être pas le plus sympathique compagnon que l’on puisse avoir, mais sa mémoire hors du commun fait de lui un véritable « computer doué d’imagination »…

 

 

En général, on ne prend pas beaucoup de risques sur le plan qualitatif lorsque l’on s’attaque à du Asimov. La Voie martienne n’échappe pas à la règle : dans ce recueil de nouvelles rédigées dans le plus pur style de l’époque et qui n’ont pas pris une ride, on retrouve avec plaisir le talent, l’inventivité et l’humour du célèbre écrivain américain. Asimov s’amuse et cela se sent : sa verve et sa malice ménagent toujours des surprises pour son lecteur, et ce même lorsque l’on est familier de sa plume. Le maître de la science-fiction joue à inverser les perspectives, toujours de façon inattendue – comme l’illustre habilement "Ah ! Jeunesse". Si les détails techniques et dialogues dialectiques ralentissent parfois le cours de l’action – "L’Attrape-nigaud" –, Asimov est loin de posséder une écriture froide, dépourvue d’émotions, et sait se montrer tantôt tendre à l’égard de ses personnages – "Ah ! Jeunesse", Les Profondeurs" – tantôt optimiste et enthousiaste face à l’humanité – "La Voie martienne". Les quatre nouvelles nous font voyager dans la tradition de l’Âge d’or de la science-fiction, mais toujours avec maturité, en soulevant d’intéressantes problématiques encore d’actualité aujourd’hui : ainsi, tandis qu’Asimov dénonce dans "L’Attrape-nigaud" l’hyperspécialisation des savants et la compartimentation des savoirs, les propos de "La Voie martienne" résonnent particulièrement avec le développement des inquiétudes écologiques de ces dernières années.  Fort de toutes ces qualités, le recueil nous offre une lecture à la fois intelligente et légère.