Les Magiciens
Journaliste et romancier américain, Lev Grossman s'est fait remarquer initialement avec le premier tome de la trilogie Les Magiciens, taxé rapidement comme le Harry Potter pour adulte. Le dernier tome de cette trilogie vient de paraître aux éditions L'Atalante.
Et si la magie existait belle et bien ?
Quentin est un jeune adolescent de 17 ans, particulièrement brillant à l'école, et d'une intelligence remarquable. Il se balade d'année scolaire en année scolaire sans difficulté, avec ses deux amis, James et Julia, cette dernière étant l'objet de ses convoitises amoureuses.
Mais sa vie bascule le jour où il se voit offrir une opportunité non refusable : intégrer une prestigieuse école de magie, pour faire de lui un magicien !
Son rêve, bercé par la lecture répétée des Chroniques de Fillory, un livre pour enfant débordant de magie, devient alors réalité. Mais à quel point ses illusions étaient naïves?
Vous avez dit Harry Potter pour adulte ?
Soyons honnête, le livre étant sorti depuis quelques années déjà, je n'ai pu m'empêcher d'aller lire quelques critiques avant ma lecture. Et il faut dire que de très nombreux lecteurs ont apparemment adoré tant le pseudo pastiche de Harry Potter, que l'originalité de l'œuvre avec des personnages paumés, désabusés, préférant volontiers l'alcool, la drogue et le sexe que l'enseignement dur et rigoureux de la magie. Notons d'ailleurs que notre protagoniste principal, Quentin, est un personnage jamais heureux, et qui malgré des talents certains, n'arrive pas à trouver une voie qui lui est propre.
D'un autre côté, il y a la fameuse critique parue dans le numéro 61 de Bifrost qui est loin d'être tendre avec ce livre, et qui avance des arguments on ne peut plus rationnels : manque de maturité pour être taxé de "adulte" à part entière, manque de profondeur et de psychologie chez les personnages.
On relèvera l'excès de manichéisme durant l'ensemble du livre, et le sentiment de "décousu" de l'ensemble. On passe effectivement une succession de chapitres pas forcément en rapport les uns avec les autres, avec parfois des ellipses temporelles importantes, et des événements qui semblent majeurs mais traités en à peine une demi-page, pour parfois retrouver une cohérence 300 pages plus loin sans trop savoir pourquoi. Le rythme est alors inégal, et désarçonnant.
Avouons-le, la comparaison avec Harry Potter est totalement inadaptée, mise à part le protagoniste principal qui est un jeune adolescent un peu paumé. Fan d'Harry Potter, passez votre chemin, ce n'est pas ici que vous retrouverez le frisson que vous cherchez. En réalité, Lev Grossman se rapproche en certains points de la littérature générale par les sujets qu'il aborde : le manque de repère, l'ennui, l'incompréhension, la peur de l'avenir et la mélancolie. Finalement, la magie sert essentiellement de support à une réflexion sur ces sujets, plutôt que comme un fil rouge rythmant l'histoire. Elle est d'ailleurs à la fois omniprésente, et à la fois délaissée, sans que l'on comprenne vraiment son importance... Nos protagonistes s'en servent parfois pour se simplifier la vie, et parfois, ils semblent oublier son existence.
L'histoire se construit à travers Quentin, qui se doit d'évoluer avec le temps, mais qui ne semble pas prendre en maturité. S'il entre à 17 ans à l'école de magie, il en sort plus que majeur, et pourtant, on ne le ressent nullement. On aurait pu retrouver un travail sur le passage de l'enfance à l'âge adulte, mais hélas on passe à côté.
Il est dommage de devoir attendre les 200 dernières pages pour enfin sentir un rythme qui s'intensifie, et une intrigue qui débute. D'ailleurs, pas de grande surprise sur les directions que prend l'intrigue, et c'est bien dommage. La fin relève peut-être un peu l'attrait, avec un appel à la suite, et, espérons-le, un Quentin qui prendra son envol. Reste qu'il y a encore deux tomes, et que je les lirai en espérant une bonne surprise.