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Astronautes morts

Aux éditions :   -  Collection : 
Date de parution : 14/09/23  -  Livre
ISBN : 9791030706130
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Salome   - le 16/11/2023

Le dernier roman de Jeff VanderMeer Astronautes morts n'est peut-être pas le plus accessible, mais il est incontestablement déroutant

Jeff VanderMeer est né en 1968 à Bellefonte en Pennsylvanie. Auteur de science-fiction et de fantasy mais aussi éditeur, on le rattache au mouvement littéraire new weird auquel est associé également China Miéville. Il a reçu le Prix du Cafard Cosmique pour La Cité des Saints et des Fous (réédité chez Au diable Vauvert 2021). Particulièrement connu pour la Trilogie du Rempart Sud et son premier tome Annihilation (Au diable vauvert 2016) qui a reçu le Prix Nebula du meilleur roman et le Prix Shirley Jackson. Il a d'ailleurs été adapté en film par Alex Garland en 2018. Astronautes Morts quant à lui, est le deuxième roman d'une nouvelle série qui fait suite à Borne (Au diable vauvert 2021), ayant pour cadre un monde post-apocalyptique provoqué par des expérimentations biotechnologiques aux répercutions écologiques sans précédent.

Une suite dans l'univers de Borne

Borne prenait pour cadre un monde post-apocalyptique où il décrivait le quotidien de Rachel, une récupératrice qui trouve Borne une étrange "créature", dans le pelage d'un animal monstrueux. Le roman s'attardait principalement à décrire leur quotidien et l'évolution de la relation entre Rachel et Borne, et les répercutions qu'elle a dans sa relation avec Wick qui ne voit pas Borne d'un bon œil. On retrouve dans Borne l'évocation de trois cadavres d'astronautes.

Astronautes Morts prend comme point de départ de conter la vie et le destin de ces astronautes, dans ce monde déjà en proie au chaos, via des visions particulièrement déroutantes où s'entremêle confusion entre temps et espace, rêve et réalité.

Une prose vandermeerienne expérimentale à son paroxysme ?

Je tire l'expression "prose vandermeerienne" de son traducteur Gilles Goullet qui a eu la primeur de nous retranscrire son style si particulier depuis ses débuts. Et si vous ne l'aviez pas remarqué, il figure d'ailleurs pour la première fois sur la couverture au même titre que l'auteur, une manière sans conteste de saluer la prouesse du passeur du mots indispensable à la transmission du style inégalable VanderMeer.

Le moins que l'on puisse dire c'est qu'Astronautes Morts n'est certainement pas le roman le plus accessible de VanderMeer, tant il plonge son lectorat dans une confusion des plus extrêmes. VanderMeer ne choisit pas de nous conter son histoire via une ligne chronologique classique, il préfère ainsi nous lâcher des bribes de descriptions alternant les différents points de vues avec le plus profond dédain pour notre compréhension, nous plongeant là dans la même confusions de ces astronautes qui se demandent s'ils sont encore vivants ou morts. Sa plume est hachée, lacérée, nous projetant des images un peu comme des flashs, passant d'un protagoniste à un autre, nous conviant à recoller les morceaux pour nous inviter à reformer nous-même cette chronologie destructurée.

Il nous parle également du destin de ce renard bleu, symbole de résistance d'une espèce en péril que l'homme a voulu façonner à sa manière au détriment du bon sens écologique. On y trouve un VanderMeer engagé, un VanderMeer enragé qui nous conte ce qui pourrait arriver (ou ce qui va certainement nous arriver ?), en n'oubliant toutefois pas de trouver de quoi décrire du beau, dans un monde effondré où il n'y a plus rien à sauver. VanderMeer décrit aussi les origines d'expérimentations biotechnologiques issues d'esprits scientifiques littéralement fous qui ont causé le désastre de l'ecosystème et causé l'humanité à sa perte. Celui du quotidien d'une femme au passé trouble qui tente de survivre tant bien que mal dans ce monde devenu hostile où toute créature biotechnologique s'est transformée en monstre sanguinaire. Entre autres.

VanderMeer nous raconte tout cela dans sa prose qu'on pourrait aisément lire à voix haute sur fond de shoegaze, à l'image de ses passages répétés, tels des mantras pour conjurer le mauvais sort d'un destin inéluctable. VanderMeer nous prend les tripes et nous retourne le cerveau jusqu'à ce qu'on tourne la dernière page d'un geste mécanique, avec le sentiment de revenir d'un bad trip en pleine conscience.

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