A l'occasion de la sortie de L’Enceinte 9, Ophélie Bruneau revient sur l'écriture de ce roman aux éditions Lynks.
Actusf : L’Enceinte 9 paraît aujourd’hui aux éditions Lynks. Quelle a été l’idée à l’origine de ce roman ?
Ophélie Bruneau : Tout a commencé avec un rêve dont je me suis souvenue au réveil de façon particulièrement intense. On y trouvait déjà le monde clos, l’implant de vision augmentée, le squat dans les maisons incendiées, le suicide incompréhensible… C’était si fort que j’ai voulu développer ces images sous la forme d’une intrigue complète.
Bizarrement, à l’approche de la parution, je me remets à me rappeler mes rêves, alors que ceux-ci m’ont échappé pendant des mois.
Actusf : Pouvez-vous nous dire quelques mots sur son intrigue ?
Ophélie Bruneau : Dans trente ans apparaît une maladie foudroyante qui laisse de lourdes séquelles aux rares personnes qu’elle ne tue pas. La communauté scientifique se retranche alors dans l’Enceinte 1 pour chercher une parade, et d’autres Enceintes se bâtissent à travers le monde.
Un siècle plus tard, aucun remède n’a été découvert. L’Enceinte 9 a perdu le contact avec le reste de l’humanité et survit grâce à la Gestion, une suite logicielle qui régente la vie des habitants. Ysa Insulae, 18 ans, entame sa carrière de policière au pire moment : les ressources s’épuisent et un attentat se prépare en secret. Heureusement, elle n’est pas du genre à se laisser mourir sans rien faire.
Actusf : Votre héroïne, Ysa, est une fille au caractère bien trempé et heureusement ! Comment l’avez-vous créée ? A-t-elle suivi la route que vous lui aviez tracé ou vous a-t-elle surpris ?
"Elle s’est peut-être révélée plus sensible que je ne l’imaginais initialement, mais c’est sans doute moi qui ai déteint sur elle."
Ophélie Bruneau : Du rêve initial, je savais qu’Ysa assurait le maintien de l’ordre et avait grandi en pouponnière. Le reste s’est déduit logiquement, à mesure que je dessinais le contexte de L’Enceinte 9 : il lui fallait une sacrée énergie et une détermination sans faille. Elle s’est peut-être révélée plus sensible que je ne l’imaginais initialement, mais c’est sans doute moi qui ai déteint sur elle.
Actusf : Fin du monde, complot… Ysa a de quoi s’occuper. Ces sujets étaient quelque chose que vous aviez envie d’aborder depuis longtemps ?
"Avec le changement climatique qui s’emballe, j’ai de plus en plus de mal à espérer un avenir qui ne passe pas par une immense catastrophe."
Ophélie Bruneau : La plupart de mes romans naissent d’images, de sensations, plus que de thèmes à aborder. C’est le cas pour L’Enceinte 9. Cela dit, le cadre choisi pour cette histoire, la pandémie survenant comme une revanche après les dégâts causés à la nature par les humains, c’est effectivement un sujet important à mes yeux. Avec le changement climatique qui s’emballe, j’ai de plus en plus de mal à espérer un avenir qui ne passe pas par une immense catastrophe.
Actusf : Y-a-t-il d’autres sujets qui vous tiennent à cœur et que vous n’aviez pas encore eu l’occasion de traiter ?
Ophélie Bruneau : Je me suis amusée avec une intelligence artificielle et avec les mésaventures d’informaticiens qui n’ont jamais assez de budget pour traiter leurs projets comme il le faudrait. J’en avais envie depuis longtemps.
Actusf : Peut-on voir dans L’Enceinte 9 une critique de notre société actuelle ?
Ophélie Bruneau : Ce n’était pas le but premier, mais oui, bien sûr.
Il n’y a pas de grand méchant dans ce roman. La Gestion n’est pas mauvaise, elle est dépassée. Le gouvernement n’est pas malveillant, il a une vision étriquée de la situation (et pense beaucoup trop à la prochaine élection). L’ombre n’a pas de mauvaises intentions mais génère une charge sur l’Enceinte. Même les terroristes veulent en finir non pas par haine, mais parce qu’ils pensent que c’est mieux que de mourir de faim !
C’est pareil dans nos sociétés modernes où l’on ne veut pas sciemment détruire ou écraser (en tout cas pas toujours), mais où, à force de ne penser qu’à soi et à court terme, on prend des décisions désastreuses.
Actusf : Quand vous avez construit votre univers, vous vous êtes senti plus architecte ou jardinier ?
"Traditionnellement, à la question « architecte ou jardinier ? », je réponds « touriste ».
Je sais où je commence, où je finis, où je dors (les points-clefs de l’intrigue), et entre deux balises, j’explore et je me fais plaisir."
Ophélie Bruneau : Traditionnellement, à la question « architecte ou jardinier ? », je réponds « touriste ».
Je sais où je commence, où je finis, où je dors (les points-clefs de l’intrigue), et entre deux balises, j’explore et je me fais plaisir. Pour L’Enceinte 9, il a fallu devenir un peu plus architecte car je projetais le monde dans le futur avec des dates et des contraintes. Comment gérer l’approvisionnement en énergie, en eau ? Quelles techniques d’agronomie privilégier ? Comment intégrer le souci permanent de l’économie dans les petites habitudes des personnages ?
Actusf : Avez-vous eu des sources d’inspiration en particulier ?
Ophélie Bruneau : À part mon rêve ? Il y a eu les dessins animés que regardent Ysa et Lidari, les bâtiments abandonnés dont j’admire les clichés sur les sites d’urbex, le groupe d’amis que j’aurais aimé avoir à l’adolescence, l’envie de montrer une figure maternelle qui n’hésite pas à taper du poing sur la table (et qui emprunte une réplique d’anthologie au Sixième Docteur)… Garder les yeux ouverts et le cœur aussi, c’est l’essentiel.
Actusf : Sur quoi travaillez-vous actuellement ?
Ophélie Bruneau : Je viens de rédiger deux nouvelles pour des anthologies à paraître au cours des prochains mois. Mon texte du moment est un polar fantastique, une sorte de chaînon manquant entre Harry Dickson et ma série Ana l’Étoilée, mais avec un rouge-gorge. Je prévoir de reprendre ensuite un roman steampunk que j’avais commencé à écrire, puis mis de côté l’an dernier.
Actusf: Où peut-on vous rencontrer dans les mois à venir ?
Ophélie Bruneau : J’irai aux Aventuriales de Ménétrol les 28 et 29 septembre, aux Halliennales d’Hallennes-lez-Haubourdin le 5 octobre, et aussi aux Utopiales de Nantes. Autres dates probables, restez dans les parages !