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Trois raisons de lire Le Château des Animaux
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Trois raisons de lire Le Château des Animaux

Aujourd'hui nous avions envie de vous parler du Château des animaux : retrouvez nos trois meilleures raisons de lire cette bande-dessinée !

Le Château des Animaux, c’est une BD en plusieurs tomes, publiée par les éditions Casterman, depuis septembre 2018.

Au dessin le jeune Félix Delep, dont c’est la première BD, mais dont le talent s’exprime avec beaucoup de force et d’évidence !

Au scénario, Xavier Dorison. Lui n’est pas à l’aube de sa carrière, il rencontre le succès dès sa première BD (lui aussi) en 1997 avec Le Troisième Testament, crée les séries Long John Silver, puis plus récemment Undertaker. En 2006 il signe le scénario du film Les Brigades du Tigre, puis en 2014 il reprend la série Thorgal, pour en signer le tome 35. Il enseigne également son art à l’École Émile-Cohl à Lyon, et dans les Ateliers de la NRF. Frustré depuis toujours par sa lecture de La Ferme des Animaux de George Orwell, il désirait depuis longtemps raconter une révolution.

Un contexte politique

Alors voilà, Le Château des Animaux, c’est le récit de la vie des animaux habitant un château, situé en France, dans une campagne isolée, quelque part dans l’entre-deux-guerre, sous l’égide du Président Silvio, un grand et fort taureau. De président il n’en a que le triste nom, car sa milice et ses décisions pour le bien de tous sont en réalité celles d’un dictateur. Vivant ou survivant dans un régime répressif et totalitaire, les pauvres animaux du reste de la ferme sont éreintés, affaiblis et exploités à travailler sans relâche pour le bien de la communauté, pendant que les quelques privilégiés du pouvoir profitent du fruit des récoltes et des richesses durement acquises. Un jour, une voix ose s’élever. C’est le début d’une révolution.

L’histoire fait bien évidemment référence au roman La Ferme des Animaux de George Orwell, publié en 1945, qui constituait une critique du régime soviétique, dans lequel les animaux de la ferme chassent les humains, et où les cochons prennent le pouvoir. Mais ce n’en est pas une réécriture ! C’est presque une continuation : plutôt que de s’intéresser à comment s’instaure une dictature, la BD explore plutôt le moyen de sortir d’un régime d’oppression, lorsqu’on est petit et faible.

On suit plus particulièrement Miss Bengalore, un chatte blanche, la seule du château, mère de deux chatons, et César, un lapin gigolo haut en couleurs. Aidés par le sage Azélar, un vieux rat à lunette, les protagonistes épris de liberté se lancent dans une révolution pacifique.
Comment lutter contre les griffes et les crocs quand on n’en a pas ? Comment déjouer un système fait pour écraser et éloigner les faibles et leur permettre de se rassembler dans une lutte commune ?

Xavier Dorison veut aller plus loin qu’Orwell, pousser la réflexion dans un contexte actuel, et il s’inspire pour ça de plusieurs mouvements historiques de révolte pacifique : Ghandi avec le mouvement pour l’indépendance de l’Inde, Martin Luther King pour le mouvement des Civil Rights, ou bien la révolution Serbe, qui ont libéré les peuples et montré la voie pour plein d’autres mouvements révolutionnaires.

Des bêtes humaines

Dans cette fable animalière, les personnages sont exclusivement des animaux, les humains ne sont que relégués à une présence bien extérieure, jamais présente à l’image, même s’ils sont toujours là, dans un fond lointain, associés à une potentielle menace si jamais le rendement baisse.

Les animaux de la basse-cour, poules, oies, moutons, ânes, font office de plèbe, peuple opprimé par l’animal le plus puissant d’une ferme : le taureau. Sous ses ordres, une milice de chiens veille au grain : surveillance des travailleurs, ordres aboyés, et distribution stricte de rations. Police partout justice nulle part au château. On ne tarde pas à saisir dans quelle situation désespérée se trouvent les animaux, et lorsqu’une voix proteste … la brutalité de l’exécution fait monter d’un cran le climat de peur qui régit leur quotidien. Propulsée à la tête de cette révolution un peu malgré elle, car elle a beaucoup à perdre, on s’identifie à Miss B. au travers de son horreur face à l’injustice. On aime la désinvolture apparente de César, qui parvient à garder un peu de lumière dans les ténèbres. Réunions secrètes, graffitis nocturnes, il leur faut du courage pour braver le danger d’être pris et contourner les règles pour ne pas être punis, courage donné par l’espoir d’un avenir meilleur et plus juste, un courage démultiplié par un possible sacrifice de soi, car malgré leur peur et les victimes faites pour l’exemple, nos personnages sont prêts à mourir.

Si leurs apparences d’animaux leur donnent un rôle, du vieux bouc têtu aux chiens bien obéissants, les dialogues et l’histoire ne tombent jamais dans la caricature, et ce sont toujours des traits humains que l’on peut discerner sur leurs visages de bêtes.

Viva la revolución

Ce que vous procurera cette BD c’est un esprit critique sur les gouvernements du monde, sur les signes qui peuvent annoncer les régimes dictatoriaux et surtout l’envie d’en sortir ou de les combattre. L’envie d’être libre et considéré justement. Car ces sujets sont abordés eux aussi très justement. On peut aussi le voir comme une manière de rendre hommage à toutes ces révolutions pacifistes, qui ont toujours nécessités les plus grands sacrifices. Mais cette série n’offre pas une vision adoucie des réalités. Des victimes écartelées par les crocs des miliciens, à la cruauté de ce quotidien, pas d’euphémisme, les plumes et les tripes volent. Humanisation des animaux ou animalisation des hommes ?

Vous serez dans les rangs des opprimés, vous aurez peur pour eux, vous voudrez lutter avec eux, mais vous découvrirez aussi que, dans tout son cynisme, le monde n’est pas noir ou blanc. Reste à savoir si les chiens mordront la main qui les nourrit mal (ou pas).

Prévue pour comprendre 4 tomes, cette série au style graphique magnifique ne fera pas que vous éblouir : elle stimulera votre esprit à penser par lui-même et vous donnera sans doute un nouveau prisme à travers lequel voir le monde. Pour le moment, les deux premiers tomes sont parus, le troisième est en préparation mais nous n’avons pas encore de date de sortie annoncée. On l’attend de pieds ferme, et pour patienter, vous pouvez également découvrir la Gazette du Château, ou bien l’édition de luxe du Château des Animaux.

Casterman vous propose aussi un trailer pour découvrir cette pépite :

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