Livre
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Alice automatique

Jeff Noon ( Auteur), Marie Surgers (Traducteur)
Aux éditions : 
Date de parution : 28/02/17  -  Livre
ISBN : 9782370490360
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MarieMarquez   - le 31/10/2017

Alice automatique

Jeff Noon est né en 1957 dans la banlieue de Manchester. Ses premiers écrits se font sous la forme d'une pièce de théâtre, Woundings, en 1986. Le premier roman viendra plus tard, en 1993 : il s'agit du mythique Vurt, qui remporte l'année suivante le prix Arthur C. Clarke. Connaissant un franc succès au Royaume-Uni, parfois comparé à William Gibson, il est une première fois publié en France chez Flammarion à la fin des années 1990. Il faudra néanmoins attendre 2006 et le travail de la Volte pour découvrir toute la virtuosité de la prose de Jeff Noon. Après PollenPixel JuiceDescendre en marche et Intrabasses, la Volte offre en 2017 une nouvelle traduction à Alice automatique, l'occasion encore une fois de saluer le travail de Marie Surgers.

De l'autre côté de l'horloge
 
1860. Deux heures moins dix. Tic tac, tic tac... Au son de la grande horloge, Alice s'ennuie, chez sa grand-tante Ermintrude, dans la banlieue de Manchester. Il n'y a vraiment rien à faire d'autre qu'attendre, attendre... Heureusement, Whipoorwill, le perroquet, lui offre une distraction bienvenue sous la forme d'une devinette. Mais pour obtenir la réponse, l'oiseau la convainc d'ouvrir sa cage... et aussitôt fait, le voici qui disparaît dans l'horloge. Ni une, ni deux, Alice s'y engouffre à son tour. Accompagnée de Célia Poupée, la voilà propulsée dans le Manchester de 1998, à la recherche des pièces de puzzle qui lui permettront de rentrer chez elle. Car il lui faut impérativement revenir avant quatorze heures, pour sa leçon d'anglais.
 
Alice psychédélique
 
Troisième livre se déroulant dans l'univers de Vurt, Alice automatique peut également être considéré comme une "trequel" aux ouvrages de Lewis Carroll, Alice au pays des merveilles et De l'autre côté du miroir. Des premiers, la filiation se tisse au fil des plumes colorées que perd le perroquet Whipoorwill et des hommes hybrides qui croisent le chemin d'Alice, ici mi-humains mi-animaux, dans une version légèrement édulcorée de ceux que l'on rencontrait dans Pollen. Des seconds, outre les liens les plus évidents quant à l'intrigue, on retrouve encore cette similitude dans le style d'écriture des deux auteurs, sous forme de jeux de mots et nonsense, qui servent ici pleinement l'intrigue sans juste l'habiller. En cela, Alice automatique est certainement l'hommage le plus appuyé de Jeff Noon à l'œuvre de Carroll. Mais loin d'être un simple pastiche, Jeff Noon réussit habilement à mêler leurs deux univers et à s'affranchir au fil du récit de l'influence de Carroll pour produire un roman purement noonien. 
 
Si vous êtes familiers des livres de l'auteur, vous ne serez pas surpris d'y retrouver ici aussi tous les thèmes qui lui sont chers, à commencer par les interrogations sur la réalité et le virtuel et les glissements perpétuels de l'un à l'autre, sans oublier la musique, avec les personnages de James Marshall Hentrails et Long Distance Davis (les références sont transparentes). Mais, conte oblige, la plume se fait plus sage, moins irrévérencieuse, et l'intrigue un peu plus lisse, même si notre Alice rencontre sur son chemin son lot de cadavres, obligée bien malgré elle à résoudre les puzzlomeurtres qui frappent la ville.
 
Particularité ici, l'auteur fait son apparition dans le récit, sous le sobriquet de Jean-François Midi, également auteur mais de fours (Churt et Pullen). Belle dose d'auto-dérision de la part de Noon et surtout l'ajout d'une dimension narrative supplémentaire au récit. Si le début du roman s'attachait à suivre les péripéties d'Alice, sur un rythme trépidant mais de manière somme toute classique, le narrateur/auteur finit par s'immiscer dans cette course contre-la-montre, commentant les actions, encourageant notre héroïne, et ramenant Alice à son statut de personnage de fiction.
 
Mettez votre cerveau de côté, oubliez toute rationalité, et plongez dans l'univers psychédélique de Jeff Noon. Conte pour enfant sous acide, Alice automatique saura aussi bien réjouir les fans de l'auteur, qui y trouveront une nouvelle preuve de son talent cette fois dans un registre plus léger, que ceux encore novices des univers nooniens, pour qui les références aux romans de Lewis Carroll agiront comme un fil rouge pour mieux apprécier cette première immersion.

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