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Software

Guy Michel (Illustrateur de couverture), Nathalie Servat (Traducteur), Rudy Rucker ( Auteur)
Aux éditions :   -  Collection : 
Date de parution : 30/11/85  -  Livre
ISBN : 2720102784
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fredcombo   - le 31/10/2017

Software

Rudolf von Bitter Rucker, dit Rudy, né en 1946, est mathématicien et informaticien. Assimilé au mouvement cyberpunk, ses influences vont de Jack Kerouac à Robert Sheckley. La plupart de ses oeuvres de fiction traduites en français ont été reprises dans la collection Lunes d'Encre. Il est également l'auteur de plusieurs livres de vulgarisation scientifique dont La quatrième dimension aux éditions Seuil.
Au fin fonds des bacs à soldes, on trouve aussi parfois Software, un vieux Galaxie Bis qui a obtenu le premier Philip K. Dick award en 1982. Il en obtiendra un second en 1988 pour la suite de ce roman, Wetware. De quoi exciter la curiosité de l'archiviste !

Isaac contre Robert

Les robots (les boppers) ont gagné leur indépendance après avoir lutté contre les lois racistes et esclavagistes d'Asimov et formé une communauté libre et anarchiste sur la Lune. Quelques années plus tard, les grands boppers tentent de fusionner avec les autres IA afin de former une seule entité. Certains petits boppers, au contraire, se rebellent pour conserver leur individualité. Plutôt mégalomanes, les grands boppers projettent également de fusionner avec le logiciel des humains (leur cerveau) afin de les intégrer dans la créature unique qu'ils sont en train de créer. La méthode consiste à décérébrer la victime, découper en fines tranches leur précieuse matière grise et analyser celles-ci pour les copier-coller dans de nouveaux corps artificiels et parfois androïdes, sortes d'extensions périphériques des grands boppers. Il leur faudra pour cela revenir sur Terre, mais l'espèce humaine reste vigilante car peu de gens sont prêts à subir l'outrage d'un décalottage forcé suivi d'une vidange crânienne intégrale...

« Un être humain, c'est un matériel, plus un logiciel, plus une existence. Que je me réalise dans la chair ou dans les circuits, c'est la même chose.»

Cobb Anderson, un des principaux protagonistes, est un barbon alcoolique vivant sur le territoire des schnoques, une réserve pour vieillards en Floride. Il fut à l'origine de l'évolution des robots et de leur émancipation, ce qui en fait un traitre de la pire espèce pour le reste de l'humanité.
L'autre personnage important du livre est un jeune fainéant et drogué surnommé Sta Hi (prononcez stay high, celui-qui-est-défoncé-en-permanence). Il accompagnera Cobb Anderson sur la Lune avec la complicité d'un grand bopper pendant que leurs doubles cybernétiques resteront sur Terre.
Pour ces deux personnages Rudy Rucker s'est inspiré de personnes réelles, en accord avec la démarche transréaliste qu'il a adoptée pour la plupart de ses romans. Le transréalisme selon Rucker consiste à brouiller les pistes entre réel et fiction dans le but de briser la réalité  consensuelle à laquelle nous adhérons tous plus ou moins. Cette méthode sonne le glas des personnages stéréotypés au service de la mégalomanie d'un créateur d'univers de papier en leur faisant prendre le pouvoir au cours de l'acte créatif, donnant ainsi un nouveau dynamisme aux littératures de l'imaginaire. Les amateurs de Fforde et de Dick apprécieront...

« — Tu ne sais pas où je pourrais trouver de l'air ?
— De l'airrr ? Qu'est-ssse que sss'est ? »

Avec ce roman, le contrat dickien est donc rempli : suffit-il d'être une créature biologique pour mériter le titre d'humain ? Ou alors la biologie ne fait pas tout et un être artificiel pourrait également prétendre à cette dénomination ?
La fin de l'histoire est quelque peu précipitée et les vingt dernières pages donnent malheureusement l'impression que l'auteur avait hâte d'en terminer. Cette lassitude se communique facilement, sans pour autant venir gâcher la très bonne impression que laisse l'ensemble du texte une fois la dernière page tournée.
Bourré de références aux plus grands auteurs (Asimov, Heinlein, Dick...), on se réjouit de constater que Rudy  connait ses classiques sur le bout des doigts. Mais il a aussi suffisemment de talent pour ne pas se contenter de copier les maîtres. Il a su digérer ses influences et parvient à leur donner un prolongement cohérent.
L'humour qui imprègne Software en fait un livre très agréable, juste un cran en dessous de Le sens de la vie, qui constitue la meilleure introduction possible à l'univers de Rudy Rucker et donnera certainement envie d'aller fouiner chez les bouquinistes pour trouver cette petite perle qu'est Software. Bonne chasse !

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